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Puis s’élevait en elle un souffle de colère
Et de menace, tel qu’il aurait pris en soi
Les grondemens voisins et profonds d’un tonnerre,
Sans que son épouvante en reçût un surcroit.

Autour du colossal et tragique édifice,
Le cercle des vaisseaux courroucés proclamait,
D’une voix vengeresse et dénonciatrice,
L’inexpiable opprobre où Rome s’abîmait ;

Et ce chœur, plus puissant que ceux du drame antique
Auxquels les Dieux donnaient de prévoir le Destin,
Annonçait, de son chant justement prophétique,
A la Ville Éternelle un châtiment prochain.


DEUX INSCRIPTIONS POUR UN AUTEL DE L’ESPÉRANCE


I


Honore l’Espérance ! Elle est la bienfaitrice
Dont les doigts lumineux pansent la cicatrice
Que laisse à notre chair notre dernier malheur ;
Elle empêche les flots pressés de la Douleur
D’être ininterrompus ; elle est le gué du fleuve,
Par lequel nous gagnons une autre rive neuve,
Différente de celle où nous pleurons assis.
Echappés un instant à nos pâles soucis,
Nous courons nous ébattre aux fraîcheurs de prairies
Où nous pouvons cueillir des guirlandes fleuries
Qui parfument nos mains et caressent nos yeux.
Quand il faut revenir sur le bord douloureux.
Nous rapportons du moins, de ces eaux traversées,
Des membres moins meurtris, des âmes délassées.
Capables de reprendre, et presque de chérir,
Sous les cieux trop fermés, leur tâche de souffrir.
Elle donne à nos cœurs, de l’une à l’autre peine,
L’espace d’un repos ; elle rend moins certaine