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maritime, comme à toute usine possible, un chef unique, un directeur, et qu’on a donc fait le contraire, précisément, de ce qu’il convenait de faire en divisant l’action au lieu de la concentrer, en paralysant l’administration, — dans le sens le plus élevé du mot, — au lieu de la fortifier. Les officiers de marine le disaient bien, il y a quelques années ; ils le disaient trop peut-être, qu’il fallait créer cet organisme de direction en faveur de l’un des leurs, le contre-amiral major général[1], car ce fut pour parer le coup que les corps auxiliaires réclamèrent avec énergie et obtinrent l’autonomie de leurs services.

La vérité, pourtant, est toujours la vérité ; on n’éteint pas aisément son flambeau. Les vainqueurs sentirent eux-mêmes le tort qu’ils faisaient à l’intérêt général et ils pensèrent calmer leurs appréhensions en établissant qu’au moment de la mobilisation, le major général prendrait les fonctions de directeur de l’arsenal. La belle conception ! Et d’une exécution facile !... Créer ce nouveau service, forcément compliqué, bouleverser tous les rouages de l’arsenal et toutes les relations des directions avec « l’autorité supérieure » au moment le plus critique, au moment où il faut que la machine marche, pour ainsi dire, d’elle-même !

Mais quoi ! Il fallait abaisser les officiers combattans en élevant tous ceux qui gravitent autour d’eux. On y est arrivé. Personne n’est plus à sa place. Les choses en vont-elles mieux ?

12 mai. — Chaque fois que j’allais à l’extrême avant et que j’y voyais les ouvriers besogner dans les niches que l’on ménage en pleine cuirasse pour loger les pattes des ancres Marrel, je me disais que cet interminable et coûteux travail « détiendrait le record » de la longueur ou, si l’on veut, de la lenteur. Eh bien ! non. Ce record sera « battu » par le plafonnement elle lambrissage des locaux des batteries.

Ah ! il en coûte, quand on enferme les gens dans une immense boîte métallique, de les garantir, d’essayer de les garantir devrais-je dire, du froid, du chaud, de l’humide !...

Le système adopté consiste à disposer en dedans des locaux, à 12 ou 15 centimètres du pont et de la muraille, un plan de tôle légère ; et c’est la lame d’air ainsi emprisonnée qui est chargée

  1. Le contre-amiral major général a déjà un rôle important dans l’arsenal. Il y représente les intérêts de la « flotte armée. » De son autorité relèvent les bâtimens qui entrent dans le port pour s’y réparer, les navires en réserve ou en essais, l’atelier militaire de réparations courantes, dit atelier de la flotte, le dépôt des équipages, une grande partie de l’outillage flottant, etc.