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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




L’événement le plus heureux de la dernière quinzaine est le voyage de l’empereur de Russie, accompagné de l’Impératrice et de leurs enfans, dans les mers de l’Europe occidentale. Les visites faites par l’Empereur au président de la République à Cherbourg et au roi d’Angleterre à Cowes sont la manifestation éclatante et précise d’une situation politique. Les visites de ce genre ont quelquefois, s’il est permis de le dire, un certain caractère de banalité ; mais personne ne dira qu’il en a été ainsi de ces deux dernières. Les paroles qui y ont été échangées en ont très nettement déterminé la portée.

Le toast de M. le Président de la République a été ce qu’il devait être, simple, cordial, confiant ; mais on se demandait ce qu’y répondrait l’Empereur. Les diplomates tendaient l’oreille, les publicistes s’apprêtaient à peser les moindres mots pour en supputer la valeur et en rechercher l’intention ; et il ne manquait pas de prophètes qui, après avoir annoncé le relâchement de l’alliance franco-russe, s’apprêtaient à se transformer en commentateurs très pointilleux. Certains journaux de l’Europe centrale répétaient volontiers que les derniers incidens orientaux avaient causé de la déception à Saint-Pétersbourg, et que la politique russe, si elle ne recherchait pas encore positivement une orientation nouvelle, éprouvait de l’hésitation à se maintenir dans celle qu’elle avait autrefois adoptée. On allait savoir si cela était vrai ; l’Empereur devait parler, on était aux écoutes. Après son discours, tout le monde a été fixé. L’empereur Nicolas ne pratique pas l’art des réticences et des sous-entendus ; la droiture de son esprit et la loyauté de son caractère se reflètent dans ses paroles ; nul ne peut se méprendre sur sa pensée, encore moins sur son sentiment. Le toast qu’il a prononcé à Cherbourg est un de ceux dont nous devons lui savoir le plus de gré. « C’est