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grand-duc Paul de Russie, plus tard empereur, service qu’il continua jusqu’au seuil de la Révolution — 1789.


XII. — FIGARO

Significative coïncidence : en 1785, l’année même où disparaissait le dernier membre de la Paroisse, Beaumarchais, digne d’occuper un fauteuil dans cette académie gazétique, expiait, au fond d’une cellule de Saint-Lazare, le Mariage de Figaro, où il avait donné l’apothéose et la synthèse du nouvelliste, sous les traits du génial barbier. Le talent de l’écrivain a fini par nous habituer à son personnage ; il nous l’a imposé à force de verve, d’esprit et de gaîté. Et nous ne nous demandons pas ce qu’il peut y avoir d’étrange dans ce valet de chambre, barbier et chirurgien, qui fait des vers et, au moment même où le rideau se lève, chantonne gaîment, un papier et un crayon à la main :


Le vin et la paresse
Se partagent mon cœur,
Si l’un a ma tendresse…
L’autre fait mon bonheur,


« Fi donc ! c’est plat. Ce n’est pas ça… Il me faut une opposition, une antithèse :


Si l’une est ma maltresse,
L’autre est mon serviteur.


« Hein ! hein ! quand il y aura des accompagnemens là-dessous, nous verrons encore, messieurs de la cabale, si je sais ce que je dis… »

Car Figaro est auteur dramatique. Bien avant M. Henri de Bornier, il amis Mahomet sur la scène, et, bien avant M. Henri de Bornier, il voit sa comédie interdite par égard pour le Grand Turc :

«… A l’instant, un envoyé se plaint que j’offense dans mes vers la Sublime Porte, la Perse, une partie de la presqu’île de l’Inde, toute l’Egypte, les royaumes de Barca, de Tripoli, de Tunis, d’Alger et de Maroc ; et voilà ma comédie flambée… »

Si bien que la Muse, non plus que la lancette et le plat à barbe ne parvenant à l’enrichir, Figaro ne sait où dîner le soir :

« Mes joues creusaient ; mon terme était échu : je voyais de