Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 52.djvu/650

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Bachaumont s’éteignait le 28 avril 1771, à l’âge de quatre-vingt-un ans. Il mourait comme il avait vécu, sceptique, aimable et bienveillant. On lui parla, sur ses derniers momens, des consolations de l’Église :

« Je ne me sens pas affligé. »

Ses entours n’en firent pas moins venir un prêtre, qui ne put pas tirer autre chose du mourant que :

« Monsieur, vous avez bien de la bonté. »

Mais quand on lui donna l’extrême-onction :

« Fi ! quelle horreur ! »

Car l’huile sentait mauvais.

Personne n’eut le courage d’annoncer cette mort à Mme Doublet.

« On voulut épargner un coup trop rude à la pauvre créature de quatre-vingt-quatorze ans qui, depuis un demi-siècle, n’avait jamais quitté cet ami. On lui cacha la mort de Bachaumont. On lui dit qu’il avait dû partir brusquement. La pensée qu’il venait de s’éloigner, sans prendre congé d’elle, lui causa un chagrin… » dont elle mourut.

Ces dernières lignes sont encore empruntées à la charmante étude que Paul Beyle et Jacques Herblay ont consacrée à la Paroisse.

Pidansat continua l’œuvre de Bachaumont et en commença l’impression sous le titre : Mémoires secrets pour servir à l’histoire de la République des lettres en France, depuis 1762 jusqu’à nos jours. On sait l’importance de ce vaste recueil, généralement nommé le Bachaumont, non seulement pour l’histoire littéraire de son temps, mais encore pour l’histoire générale.

Après que Pindansat de Mairobert se fut suicidé, le 27 mars 1779, sa tâche fut reprise et achevée par Moufle d’Angerville.

En regard des Mémoires secrets, il importe de signaler un autre grand recueil de nouvelles à la main, qui, à peu d’années près, date de la même époque : La Correspondance secrète, politique et littéraire ou Mémoires pour servira l’histoire des Cours…, connue généralement sous le nom du plus célèbre « nouvellant » de ce temps, le bonhomme Métra.

Métra n’eut rien de commun avec la Correspondance secrète. Celle-ci est l’œuvre d’un bureau de nouvellistes semblable à la Paroisse, mais qui est parvenu à se soustraire aux investigations des policiers et à celles des historiens.

MM. Paul d’Estrée et Maurice Tourneux ont démontré que