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d’assez puissant. Ses manifestations paraissaient considérables. Tout d’un coup trois de ses membres, dont M. Herriot, maire de Lyon, ont donné leur démission avec éclat. Quelques jours plus tard, le président du Comité lui-même, M. Lafferre, a donné la sienne. Cela ne veut pas dire que ces messieurs soient d’accord : ils sont, au contraire, à l’antipode les uns des autres, M. Herriot voulant renverser le ministère et M. Lafferre le conserver. On s’est empressé autour d’eux ; on les a réconciliés bon gré mal gré ; on a voté un ordre du jour qui a rétabli l’équivoque que leurs démissions avaient un moment dissipée. Si le comité est divisé, c’est que le parti l’est aussi ; il l’est entre ministériels et anti-ministériels. Un bon nombre de radicaux socialistes sont résolus à risquer une nouvelle bataille contre le Cabinet. Ce sera sans doute la dernière ; si le Cabinet en triomphe, il aura bien des chances de durer jusqu’aux élections prochaines ; tous les radicaux, après cet effort, ne songeront plus qu’à lui confier leurs intérêts électoraux. Mais en triomphera-t-il ? S’il fallait parier, nous parierions pour lui. Les radicaux nous ont donné si souvent le spectacle d’accès de courage qui n’aboutissaient jamais arien que nous serions surpris de les retrouver différens d’eux-mêmes. Ils nous rappellent invinciblement les moutons de la fable qui ont pris à l’égard du berger l’engagement d’honneur de faire front au loup et de l’étouffer sous leur nombre.

Chacun en répond sur sa tête.
Guillot les crut, et leur fit fête.
Cependant, devant qu’il fût nuit,
Il arriva nouvel encombre :
Un loup parut ; tout le troupeau s’enfuit.

Nous verrons ce qu’il en sera le 18 juin, car c’est ce jour-là qui a été choisi pour l’interpellation. Tout le monde s’y est donné rendez-vous, la droite avec M. Delahaye et M. Gauthier de Clagny, l’extrême gauche socialiste avec M. Jaurès. Quant aux radicaux socialistes, il y a un mois déjà qu’ils avaient désigné un des leurs, pour descendre en leur nom dans l’arène. Il est vrai que, depuis lors, on n’avait plus entendu parler de lui, ni de son interpellation ; mais après ce qui vient de se passer dans le Comité, comment reculer ? Nous attendons ce grand combat, sans nous faire illusion sur son résultat qui sera vraisemblablement négatif. En réalité, le véritable intérêt est aujourd’hui, ou plutôt, il va être au Sénat qui s’apprête à discuter la loi spéciale sur les, retraites des employés des chemins de fer et la loi plus