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États-Unis et les républiques de l’Amérique espagnole. L’indifférence actuelle à leur égard lui paraissait un sérieux danger : « Elle est voisine, — disait-il, — de l’inimitié, qui pourrait conduire à son tour à une situation qui équivaudrait à une alliance contre nous. » Les Etats-Unis se verraient ainsi privés, au bénéfice des puissances européennes, « de l’empire commercial qui légitimement leur appartient. » Mais, pour que le commerce avec ces pays se montrât réellement fructueux, il fallait avant tout mettre un terme à l’état presque permanent d’hostilités régnant dans l’Amérique du Sud. Quelle plus belle tâche s’offrait aux Etats-Unis que de se faire les arbitres de ces différends, et devenir les protecteurs de la paix dans le Nouveau-Monde ! Blaine fit accepter le projet d’une conférence où serait discutée entre les représentans des nations indépendantes de l’Amérique la question de l’arbitrage. Il ne doutait pas du succès de ce Congrès de la paix, qui serait suivi, il l’espérait, d’une conférence commerciale où l’on jetterait les bases « d’un meilleur système de commerce entre les deux continens[1]. » La mort soudaine de Garfield vint empêcher la réalisation de ces plans. Mais l’idée de Blaine ne fut pas abandonnée : et le 2 octobre 1889 s’ouvrait à Washington la première « Conférence internationale américaine. » Blaine, redevenu secrétaire d’Etat depuis quelques mois, eut la joie et l’honneur de la présider. On avait réuni cette fois le projet politique et le projet commercial : la conférence devait élaborer un projet d’arbitrage obligatoire et jeter les bases d’une union douanière entre les nations du Nouveau-Monde. « Nous voulons, — avouait la presse américaine, parlant de cet ambitieux dessein, — entrer dans les ports de ces pays, tandis que l’entrée en sera interdite à nos concurrens européens. » L’ampleur même de ces projets devait les faire échouer. Les États de l’Amérique latine ne pouvaient accepter semblable tutelle. Les délégués parvinrent, après beaucoup d’efforts, à mettre sur pied une convention d’arbitrage : quelques traités furent signés, aucun ne devait être ratifié. Quant au plan d’union douanière, il ne supporta même pas la discussion, et l’on dut se borner à conseiller la conclusion de traités de commerce particuliers entre les diverses nations. Avant de se séparer, la conférence créa cependant l’ « Union internationale des républiques américaines, » sans but nettement

  1. James G. Blaine : Foreign policy of the Garfield administration.