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I

Une des choses qui importent le plus, sans doute, à la connaissance d’un écrivain, c’est de déterminer et de distinguer ce qu’il a dû soit à ses prédécesseurs, soit à ses contemporains, et ce qu’il a reçu de sa propre nature ou s’est donné à lui-même. Cette distinction, en ce qui concerne Ménandre, demeurait fort incertaine avant les dernières découvertes. Elle est peut-être un peu plus claire aujourd’hui.

Athénien de race et de naissance, Ménandre, lorsqu’il débuta au théâtre, en 321 avant notre ère, y apportait, outre ses dons naturels, un héritage littéraire considérable, dont l’influence allait se faire sentir jusque dans les moindres détails de son œuvre. Il avait reçu très certainement l’éducation la plus complète et la plus soignée. Rien de ce qui était athénien ou même grec ne lui était étranger. Son théâtre dénote une connaissance, au moins superficielle, de la philosophie contemporaine ; il atteste également une pratique, peut-être assez familière, de la rhétorique et de ses préceptes. Rhétorique et philosophie, c’étaient alors les deux formes principales de toute haute culture intellectuelle et morale. Il était, en outre, initié aux secrets de l’art dramatique. Son oncle Alexis, poète comique de renom, fut, dit-on, son éducateur. Et, sans doute, il se fit son premier guide dans l’art où il devait exceller, non seulement en lui en faisant connaître la technique, mais en l’excitant à lire, ou même en lisant avec lui, les meilleures des pièces qui en constituaient alors le répertoire. La tragédie du siècle précédent n’eut qu’à se montrer à lui dans ses grandes représentations annuelles pour le séduire. C’était le temps où la gloire d’Euripide, désormais incontestée, s’imposait. Le jeune Ménandre conçut tout d’abord pour le grand poète tragique une admiration passionnée, qui ne devait subir aucune défaillance. On savait déjà par Quintilien qu’il l’avait pris constamment pour modèle[1]. Cette imitation se

  1. Institution oratoire, X, d, 69 : Hunc et admiratus maxime est, ut sæpe testatur, et seculus, quanquam in opère diverso, Menander.