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III

A partir de 1860, à l’occasion de plusieurs séquestrations dans le genre de celle que j’ai citée plus haut et qui ont été jugées arbitraires par l’opinion publique, la loi de 1838 commence à être attaquée. On la trouve surtout « attentatoire à la liberté individuelle » à cause de la toute-puissance qu’elle accordé aux préfets et de l’importance énorme qu’elle attache à un simple certificat médical. La question de la réforme de cette loi est reprise en différentes fois. Un nombre considérable de députés et de sénateurs, médecins pour la plupart, tous inspirés consciemment ou inconsciemment par Esquirol, présentent des projets et des rapports parlementaires. Mais il faut abréger pour arriver au projet du docteur Dubief, ancien ministre de l’Intérieur, discuté et voté par la Chambre des députés en janvier 1907.

Plusieurs particularités caractérisent la loi nouvelle dont le Sénat doit s’occuper prochainement. La principale de ces particularités est clairement énoncée dans son article premier, ainsi conçu : L’assistance et les soins nécessaires aux aliénés sont obligatoires. La tendance dominante est donc non l’ « enfermement » pur et simple de l’aliéné considéré par la loi ancienne comme étant toujours un être anti-social, mais le traitement de l’aliéné jugé par la nouvelle loi comme étant avant tout un malade. Cette conception rationnelle, déjà introduite et largement développée par Esquirol, conduit à un ensemble de dispositions législatives qui ont pour la plupart et constamment ce double but :

Traiter le malade le plus tôt et le mieux possible ;

Garantir le malade et son entourage contre tous les méfaits pouvant résulter des troubles psychiques commençons.

Nous allons voir, en effet, que le projet du docteur Dubief essaie de répondre d’une façon pratique à cette double indication.

Tout d’abord, le projet tend à faciliter l’entrée précoce des malades dans un établissement approprié en déclarant cette entrée purement provisoire. Le paragraphe 3 de l’article 13 dit, en effet, ceci : « Les personnes admises dans les établissemens d’aliénés, conformément aux dispositions précédentes (demande d’admission, rapport médical circonstancié), ainsi que les personnes dont le placement aura été ordonné d’office, ne sont