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largement parmi eux l’instruction à tous les degrés, et de supprimer les mesures disciplinaires exceptionnelles qu’une sévérité qui n’a plus sa raison d’être aujourd’hui fit adopter jadis.


III. Les indigènes sont-ils perfectibles et peuvent-ils se rapprocher de nous ?

Mais notre nouvelle politique ayant été orientée vers le perfectionnement des races soumises et leur rapprochement avec la race conquérante, on va se demander si les indigènes sont perfectibles, et si ce rapprochement si désirable est possible. Cette question a beaucoup passionné en d’autres temps l’opinion. Résolue affirmativement par les colons libres de la première heure qui, de 1830 à 18io, firent de si grandes choses en s’appuyant sur le concours des indigènes, elle l’a été négativement par les colons soutenus par l’administration qui suivirent, et qui ont fait prévaloir l’avis que le musulman est un fanatique incorrigible et réfractaire à tout progrès. Et, aujourd’hui encore, certains s’en tiennent à cette opinion toute faite. Mais une pareille manière de voir est-elle fondée, et trouve-t-elle sa confirmation dans ce qu’on a vu autrefois et dans ce qui se déroule, actuellement, sous nos yeux en Algérie ?

Dans le passé, les Arabes ont connu une époque de civilisation brillante, alors que l’Europe était plongée dans les ténèbres. Ils ont beaucoup contribué à la connaissance du globe par leurs innombrables voyages et par leurs publications géographiques. Dix siècles avant notre Académie des Sciences, le kalife Al-Mamoun avait, à deux reprises, employé ses astronomes à déterminer la mesure exacte de la longueur d’un degré du méridien terrestre. Leurs connaissances étaient étendues en mathématiques, en astronomie, en médecine ; ils ont découvert l’algèbre. C’est par leur intermédiaire que nous avons connu l’antiquité grecque et latine.

Dans le présent, bien des indices généraux tendent à démontrer que la population indigène n’est nullement en voie de dépérissement. Tout d’abord, il est à relever que les excédens de la natalité vont sans cesse croissant : après avoir oscillé de 0,6 à 3 pour 1 000 de 1876 à 1895, ils s’élèvent à 8 pour 1 000 de 1896 à 1900, à 9,60 les années suivantes. Dans le domaine où