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refroidir tant soit peu, pour le moment, les relations étroites entre les deux pays ; mais que faire quand les intérêts de notre patrie sont en jeu ? — Jamais je n’aurais pu croire que la France prendrait cette question si à cœur ; jamais je ne prévoyais qu’elle pût donner lieu à des complications européennes qui me navrent, mais, au point où nous en sommes arrivés, reculer serait honteux. Il faut avant tout sauver l’honneur national. Je finis donc en disant, la main sur ma conscience et bien convaincu que nous n’avons porté aucune atteinte à la bonne amitié qui nous unit à nos voisins les Français : En avant et vive l’Espagne ! — PRIV. »

Et il nous faisait remettre par Olozaga une circulaire de Sagasta, son ministre des Affaires étrangères, qui nous narguait sans aucun ménagement : « Les conditions toutes favorables dans lesquelles se trouve ce prince et le bon accueil que sa désignation a rencontré dans l’opinion publique du pays, donnent au gouvernement l’agréable espérance que son candidat sera bientôt nommé Roi par les Cortès avec une grande majorité, et qu’ainsi se terminera la glorieuse période constituante commencée en septembre 1868. » Cette circulaire le prend de fort haut avec nos objections et leur oppose pour la première fois le mensonge arrêté entre Prim et Bismarck, que nous allons entendre souvent : « Le gouvernement a agi seul, pour son propre compte et s’est entendu directement avec Léopold, sans qu’un seul moment il ait pensé que son honneur lui permît de transiger avec la moindre influence d’un Cabinet étranger… C’est le désir seul d’accomplir les vœux de la nation qui a conduit le gouvernement du Régent à proposer la candidature au trône d’Espagne à un prince majeur, maître absolu de ses actions, et qui, par ses relations de parenté avec la plupart des maisons régnantes d’Europe, sans être appelé à la succession au trône d’aucune d’elles, excluait dans cette situation toute idée d’hostilité contre une puissance quelconque. » Enfin Prim faisait rééditer par Salazar son opuscule d’octobre 1869, dans lequel il a l’impudence de dire « qu’il est notoire que l’échec de Montpensier et de la République tient au veto de Napoléon. Le gouvernement prussien n’est pas intervenu dans cette négociation ; le prince a écrit à Ems au Roi sa résolution définitive comme acte de courtoisie. »

Ainsi Prim nous bravait de plus en plus ouvertement,