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dits Aosthène. » De Montpellier, M. de Bouillaco est allé à Alet en passant par Narbonne pour y prendre les ordres de M. de Rebé, et il a convoqué l’assemblée d’assiette pour le 1er mai 1658. « Ce jour-là, mon dit seigneur l’évêque d’Alet et lui s’étant rendus à Limoux, ils y trouvèrent M, le marquis de Rebé et quantité de consuls et de députés qui ont droit d’assister à la dite assiette, de laquelle l’ouverture ayant été faite le 2 du dit mois, il y parut la contestation qui était entre les sieurs Esprit, lieutenant principal, et Cayrol, juge criminel. » L’un et l’autre prétendaient, en effet, entrer à l’assiette en qualité de commissaire ordinaire en l’absence du juge mage, Aosthène l’aîné. « Et comme il vint à la connaissance de l’évêque d’Alet que le sieur Cayrol attroupait du monde à dessein de se rendre maître de l’hôtel de ville, le sieur Cayrol, premier consul, vint lui dire qu’il y avait apparence d’une grande rumeur dans la ville, si on disputait l’entrée à son frère. » L’évêque lui répondit « que ceux qui portaient la nouvelle de ces émotions étaient ordinairement ceux qui les excitaient, qu’étant consul, il en serait responsable, et que toutes ces émotions ne tendaient qu’à se rendre maîtres dans l’assiette pour traverser les poursuites contre les sieurs Aosthène. » L’évêque et le commissaire des États entrèrent alors en séance ; mais ils entendirent bientôt un grand bruit dans la cour de l’Hôtel de Ville, et, s’étant levés, ils virent par les fenêtres le marquis de Rebé « parmi un grand nombre d’hommes armés qui accompagnaient le sieur Cayrol, et qui insolemment criaient qu’il fallait tuer Esprit, et faire entrer Cayrol. » On parvint à mettre Esprit en sûreté, et le marquis de Robe fut dépêché immédiatement à Narbonne pour avertir son frère l’archevêque de ce qui se passait à Limoux. Celui-ci conseilla de tenir l’assiette au château de Cornanel qui, situé entre Limoux et Alet, était une propriété particulière des évêques d’Alet. Mais pendant ce temps Cayrol, les consuls de Limoux et les amis des Aosthène tinrent de leur côté à Limoux une assiette, qui fut bientôt cassée par un arrêt du Conseil du 11 juin 1658.

Après avoir assisté à l’assiette de Cornanel, la seule régulière, M. de Bouillaco rentra à Montpellier. Là « il trouva la plus grande partie des personnes de condition, de l’un et de l’autre sexe, sollicitant pour les sieurs Aosthène. » Néanmoins, « par une grâce toute particulière, les cabales qu’on faisait pour surprendre des juges pleins d’intégrité furent découvertes. » Les