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miniatures faites du roi-citoyen et de ses proches. Grâce à son commentaire aussi attachant que bien informé, nous pouvons suivre Louis-Philippe d’Orléans depuis sa naissance, au Palais-Royal, en 1773, jusqu’au règne de Louis XVIII, durant les loisirs que lui firent le règne de son cousin et la politique du parti royaliste, au milieu des épreuves sans nombre que lui imposèrent sa mise hors la loi et ses longues et incessantes pérégrinations à travers le monde. Et l’analyste, toujours sympathique aux d’Orléans, nous fait entrer dans leur intimité, nous initie aux détails les plus piquans sur les parens de Louis-Philippe, sur le mariage du Duc et de la Duchesse de Chartres, la fille du pieux et charitable Duc de Penthièvre. Cette princesse, martyre du mariage d’Etat, nous apparaît, dans les portraits de Chantilly, avec sa grâce dolente et résignée en face de sa rivale, la triomphante, insinuante et rusée Mme de Genlis, le « gouverneur, » qui, à Saint-Leu comme dans le Pavillon de Belle-Chasse, s’était substitué à la mère jusque dans l’éducation trop fournie, trop touffue, des princes qui adoraient la maîtresse de leur père. C’est à elle que le Duc de Chartres écrivait : « Je me priverai de mes menus plaisirs jusqu’à la fin de mon éducation, c’est-à-dire jusqu’au 1er avril 1790, et j’en consacrerai l’argent à la bienfaisance. Tous les premiers du mois, nous en déciderons l’emploi ; je vous prie d’en recevoir ma parole d’honneur la plus sacrée. Je préférerais que cela ne fût que de vous à moi ; vous savez bien que mes secrets sont toujours les vôtres. » Et nous lisons dans son Journal : « J’ai dîné hier à Bellevue (janvier 1791). Le soir après le souper, je suis rentré chez mon amie : j’y suis resté jusqu’à minuit et quelques minutes ; j’ai été le premier qui ait eu le bonheur de lui souhaiter la bonne année. On ne pouvait me rendre plus heureux. En vérité, je ne sais pas ce que je deviendrai quand je ne serai plus avec elle. » On voit que Mme de Genlis, la fine coquette qui savait jouer son jeu en comédienne, — et qui a fait dans ses Mémoires le récit de la Fête de la Sauvinière, donnée par elle quand la source de ce nom eut rendu la santé à la Duchesse d’Orléans, — pouvait inspirer aussi des sentimens louables. Sur cette confiance affectueuse, sur les États Généraux, la Révolution française, Jemmapes et Valmy, le triste rôle joué par Philippe-Égalité à la Convention, sa visite chez Danton, sa mort, puis le voyage du jeune Duc d’Orléans en Scandinavie, la délivrance des princes, la réconciliation avec le Roi, le mariage du Duc d’Orléans en Scandinavie, son séjour à Twickenham et sa rentrée en France, on trouvera ici bien des renseignemens, sinon très nouveaux, toujours intéressans.

Nous n’avons plus à faire l’éloge de l’incomparable série des