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Constitution suscitait à Versailles. Fallait-il réunir les princes en Congrès et le Reichstag dans cette ville ? Fallait-il appeler les rois de Bavière et de Wurtemberg à Fontainebleau pour rédiger le pacte définitif que signeraient ensuite les princes et que ratifieraient leurs peuples ? Mais Louis II, dont la tête peu équilibrée se laissait aller aux mouvemens les plus bizarres, demandait un agrandissement de son royaume à l’Ouest. Le roi Charles de Wurtemberg hésitait toujours, puis, vigoureusement sollicité par Mittnacht et Suckow ses ministres, promettait de déléguer deux ministres à Versailles pour étudier le nouveau pacte fédéral. Le 12 octobre, Bismarck invite Mittnacht et Suckow à venir, en même temps que Jolly et Freydorf, les représentans du grand-duc de Bade. Le 18 octobre, Louis 11 se décide à envoyer, comme délégués de la Bavière, le comte de Bray, les généraux de Lulz et Prankh. La Hesse désigne comme délégués MM. de Dalwigh et Hoffmann, ce qui forme un conseil de neuf membres qui va se réunir à Versailles, pour des propositions pratiques, sous la présidence du chancelier.

La position de Bismarck était loin d’être une sinécure. Il avait à traiter en même temps de l’armistice avec M. Thiers ; de la liberté de la Mer-Noire avec les Russes et les Anglais ; de l’unité allemande avec les délégués des princes et des rois. En conflit avec le Roi et le prince royal, avec l’état-major et les courtisans, il n’avait alors que Delbrück pour l’aider, et bientôt même il devait s’en séparer pour les négociations de Berlin. Aussi, continuait-il à se plaindre à sa femme de ses fatigues et de ses énervemens, des marchandages et des utopies dont on l’accablait. Il finit par obtenir pour collaborateur secret dans cette délicate négociation le grand-duc Frédéric de Bade, qu’il avait mandé tout exprès le 6 novembre à Versailles, pour se servir de son influence sur les princes allemands.

Le comte de Bray émettait l’idée bizarre d’unir par un traité d’amitié la Confédération du Nord avec la Bavière, en augmentant la Confédération de l’adhésion de Bade, de la Hesse et du Wurtemberg, et en laissant à chaque Etat sa propre individualité. Le roi de Bavière à côté de l’empereur allemand paraîtrait comme représentant de l’Empire, ce que Bismarck appelait plaisamment l’Empire alternatif. Comment réaliser une combinaison par laquelle le Roi voulait que l’Empire allemand, c’est-à-dire la présidence de la Confédération, alternât héréditairement entre la