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droit comme le fondement le plus solide de la vie d’une nation, à combattre à outrance une loi qui tendait à la ruine de la légalité. Ils trouvaient plus odieux encore que le procédé, les efforts faits pour en contester le caractère illégal[1],

Les propriétaires allemands des provinces de l’Est demandèrent au Landtag protection contre cette manière de défendre le germanisme menacé, et exprimèrent la ferme conviction que le projet du gouvernement, s’il était voté, causerait les plus graves préjudices aux Allemands établis dans cette région. Les signataires de cette pétition étaient au nombre de 168 et possédaient environ 100 000 hectares. De leur côté, les commerçans allemands de Posen attestèrent par centaines que les rapports tendus entre Prussiens et Polonais influaient déjà très fâcheusement sur la vie économique de la province, et que les Allemands de l’Est souffriraient considérablement de la loi d’expropriation.

Mais il semblait démontré que la gloire de Bismarck et l’amour-propre de la bureaucratie prussienne étaient intéressés à ce que la Commission de colonisation continuât son œuvre sans relâche. Puisque les Polonais refusaient de sauver la patrie allemande en cédant à l’amiable leurs terres au roi de Prusse, on les leur prendrait au nom de la loi, par force.


Und bist du nicht willig, so brauch’ ich Gewalt.


Il y a tout une philosophie de l’histoire dans ce vers de la ballade du Roi des Aulnes.

Une loi de 1874 règle le droit commun en matière d’expropriation. Le gouvernement n’osa l’appliquer dans un cas où l’on ne pouvait la justifier que par des motifs « politiques » ou « nationaux. » Il demanda 400 millions de marks et le droit d’expropriation au Landtag. C’est là qu’il faut aller entendre partisans et adversaires.


{‘c|II }}

Pour entraîner l’opinion, le chancelier de l’Empire développa des raisons « nationales. » Pour justifier l’urgence de son activité, la Commission de colonisation fournit des raisons

  1. Francfurter Zeitung, 17 janvier 1908.