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Elle fut communiquée à Daschkoff par un message expédié le 30 septembre et confirmé le H octobre. On le remerciait de son zèle, on en était satisfait et on lui prescrivait de faire des propositions au général « dont les talens, la conduite et la réputation lui ont depuis longtemps acquis l’estime de Sa Majesté, qui désire faire une acquisition aussi utile. »

« S’il les accepte, disait Romanzoff, vous l’engagerez à se rendre au plus tôt en Russie, en l’assurant qu’il y sera très bien reçu et retrouvera dans la bienveillance de Sa Majesté de quoi justifier la confiance qu’il montrera. S’il vous propose des conditions, vous voudrez bien me les transmettre sans délai et je n’en mettrai aucun à vous faire parvenir la réponse de nôtre auguste Maître. »

Ces ordres parvinrent à Daschkoff, le 24 février 1813. Sa réponse, en date du même jour, témoigne de son émoi, provoqué moins encore par l’importance de la mission qu’on lui confiait et dont il promettait de s’acquitter, que par une lettre de Moreau, datée de Philadelphie, qu’il venait de recevoir et qui semblait devoir la lui faciliter. Cette lettre, dont il envoyait à Romanzoff la copie en chiffres, Moreau la lui avait écrite après en avoir reçu une de Rapatel. Celui-ci lui mandait de Riga, le 26 octobre, que l’accueil du Tsar avait dépassé ses espérances et qu’il resterait à jamais reconnaissant de tant de bontés, qui tiraient un plus grand prix des éloges prodigués par ce prince à Moreau, au cours de ses conversations. Tout échauffé par ces éloges, Moreau chargeait Daschkoff d’en rendre grâces à son maître. Puis, s’inspirant des détails que lui donnait Rapatel sur les péripéties de la campagne où Napoléon venait de voir périr son armée et auxquelles il s’était dérobé par la fuite, il émettait un avis précis et formel sur les moyens les plus sûrs de précipiter la chute du « lâche auteur de tous ces maux. »

« Il est bien malheureux qu’il ait seul échappé au désastre de son armée. Il peut encore faire bien du mal, tant est grand l’ascendant que lui donne la terreur sur les trop faibles et trop malheureux Français. Il n’est pas douteux pour moi qu’il a autant fui ses soldats indignés que les lances de vos cosaques. Les prisonniers en Russie doivent être furieux de ce qui leur est arrivé et ne doivent respirer que vengeance. Si un nombre assez considérable de ces malheureux consentait à être jeté sur la côte de France sous mes ordres, j’ose répondre que Bonaparte