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Nous donc qui maintenant, par une heureuse grâce,
Possédons pour nous seuls les instans prêts à fuir,
Inscrivons la beauté comme un signe à leur face,
Et pénétrons d’amour leur éphémère trace,
Afin qu’un lent arôme y reste en souvenir !

Honorons bien les jours aux heures nuancées ;
Qu’ils ne s’écoulent pas en flots inconsistans !
Déposant dans leur sein nos forces condensées,
Remplissons-les d’émois, d’actes et de pensées
Qui ne soient pas trop vite emportés par le temps !


NOUVEAUTE


Toi que je découvre en passant,
Forme neuve, souple colline,
Ton pur contour est ravissant,
Ta couleur, exquisement fine.

Ta pente en douce liberté
Vient s’unir au vallon sauvage ;
Tu sembles à part : la beauté
Est ton magnifique avantage.

Je t’admire… Je t’aimerais
Si, durant mon enfance heureuse,
Mon regard eût suivi de près
Les plis de ta cime onduleuse,

Si j’avais vu l’ardent soleil
Illuminer ta vive face,
Quand ma jeunesse en plein éveil
S’élançait vers le vaste espace,

Si ta ligne au bord du ciel clair
Eût plané comme une auréole
Sur le doux front d’un être cher,
Disant quelque tendre parole !…