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Le château décoré d’une élégante tour
Où, voilà trois cents ans, vous avez vu le jour
O mon aïeule Madeleine !

C’est là que vous avez innocemment grandi,
Là que votre jeunesse a d’abord resplendi,
Aube suave, et ce fut l’heure
Où votre grâce enfin, quittant le toit natal,
Suivit le triomphant cortège nuptial
Qui montait vers notre demeure.

Mais mon rêve lointain s’attarde volontiers
A vous voir en ces lieux où vous vous abritiez
Durant vos jours de jeune fille ;
Mon cœur vous y contemple à cet âge enchanteur
Où vous alliez, jetant une blanche lueur
Dans l’ombre de cette charmille.

Voilà devant mes yeux la forme de pays
Qui touchait autrefois vos regards éblouis
Lorsque s’ouvrait votre fenêtre,
Encadrant votre clair visage et votre main,
Tandis que le passant s’arrêtait en chemin,
Pour voir cette aurore apparaître.

C’est ici, la terrasse où vous veniez souvent :
Quand sur elle battaient les coups pressés du vent,
Vos fines dentelles légères
Devaient en longs frissons frémir autour de vous,
Comme si vous alliez, avec les souffles fous,
Voler aux sphères étrangères !

Voici toujours le parc à l’ombrage songeur
Dont les arbres anciens, que j’envie en mon cœur,
Vous ont vue errer claire et rose,
Voici la vieille église où vous avez prié,
Et la fontaine au flot toujours vivifié
Dans le bassin qui la tient close.