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nécessaires. L’empereur Nicolas prit au sérieux ces paroles du ministre français et mit sur le rapport de l’ambassadeur l’annotation suivante : « Nous y voilà enfin après trois ans ! »

Comme on peut le croire, les dispositions des trois Cabinets monarchiques du Nord ne modifièrent en rien la marche de la politique intérieure en France. Le gouvernement de Louis-Philippe comptait bien plus avec les partis politiques et les vœux de la nation française, qu’avec les dispositions académiques du congrès des trois monarques. Il est probable que Pozzo di Borgo, ainsi que ses collègues d’Autriche et de Prusse, avaient en vue cette force des choses insurmontable, lorsqu’ils rédigèrent leurs Observations sur la situation intérieure de la France pour les communiquer en novembre à leurs gouvernemens. Il est fort possible que l’ambassadeur de Russie en ait été le principal auteur.

Ces Observations retracent un tableau de la situation intérieure de la France et constituent ainsi une réponse concluante à la doctrine de Münchengrætz et aux exigences formulées sur cette base. L’Europe entière, y lit-on, se trouve partagée en deux camps : dans l’un se trouve la France, — ce produit de la révolution, — dans l’autre l’Europe septentrionale, c’est-à-dire les trois puissances du Nord. On se demande involontairement dans lequel des deux camps se trouvent les autres États ? Cette question est restée ouverte.

En ce qui touche la politique intérieure de la France, les auteurs des Observations affirment qu’après la mort de Casimir Perier, le roi Louis-Philippe saisit lui-même les rênes du pouvoir et dirigea en personne la politique intérieure et étrangère du pays. Le ministère actuel convient parfaitement au Roi. Les deux ministres doctrinaires, Broglie et Guizot, sont le type du système révolutionnaire sous la dénomination de constitution et de progrès (sic). Ces ministres se montrent très sévères pour leurs ennemis politiques : les légitimistes et les républicains. Mais « ils excellent dans la faveur qu’ils accordent à toutes les résistances qui éclatent, au dehors, contre les autorités établies. Il suffit qu’un village s’insurge, qu’une assemblée de démagogues en Suisse ou en Allemagne s’élève pour qu’ils se prononcent contre les Souverains et les pouvoirs qui gouvernent. Dans leurs relations avec les Cabinets étrangers, la hauteur de leur langage est en raison1 inverse de la force de ceux auxquels