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masse de se gâter tout à fait. Soit qu’elle partage les préjugés de sa classe, ou qu’elle n’ose les heurter de front, elle ne combat point en faveur de la neutralité politique, et ne proteste point contre le régime d’intolérance qui est universellement entré dans les mœurs. Mais elle a pu, en certains endroits, faire prévaloir des idées de prévoyance et de solidarité, créer même un embryon d’organisation éducative. C’est grâce à la présence de cette élite, que diverses sociétés socialistes, comme la Bellevilloise, l’Utilité sociale, l’Union du XIXe arrondissement, la Famille, du XVe, ont établi un fonds de développement collectif, destiné à accroître les ressources sociales. Il est alimenté par un prélèvement sur le montant des ventes (1 p. 100) ou sur celui des bonis (10 p. 100). Ce n’est pas un mince mérite d’avoir imposé à la masse un abandon d’une part de ses bonis : car, en y renonçant sans retour, la génération actuelle des membres est incertaine de recueillir les fruits de son abnégation : elle n’a que la certitude du sacrifice.

Les coopératives socialistes consentent plus volontiers à distraire une part des bonis en faveur de caisses d’assistance mutuelle, parce que les sacrifices consentis peuvent soulager immédiatement des souffrances visibles, des gênes momentanées, et que chacun peut être appelé à en bénéficier. Beaucoup d’entre elles ont créé des Caisses de « prêt gratuit ; » les plus riches, des services médicaux. Des « caisses de solidarité » viennent en aide aux membres éprouvés par le chômage ou la maladie. En 1906, plusieurs sociétés ont suivi l’exemple de la Bellevilloise, la Ménagère, du XVIIe arrondissement, a distribué gratuitement aux chômeurs du pain et du lait ; l’Utilité sociale leur a versé 500 francs : l’Égalitaire a fourni aux « soupes grévistes » environ 8 000 francs de marchandises, viande, charcuterie, légumes, « pot-au-feu » et charbons.

A la mort d’un sociétaire, la veuve et même la « compagne » comme à la Bellevilloise, l’Avenir de Plaisance, la Prolétarienne de Montmartre, la Glaneuse de Montrouge, reçoit une somme fixe de 40, 50 ou 100 francs, à laquelle s’ajoute une seconde indemnité, variable avec le nombre des enfans en bas âge. A la naissance d’un enfant, la famille reçoit 20 francs ; la Prolétarienne, la Ménagère, allouent même 30 ou 35 francs, « en cas d’accouchement gémellaire. »

Les chefs de l’ « École de Nîmes, » de l’École « bourgeoise, »