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dernier nourrisson[1]. Continuez avec le même courage, et songez toujours, même avec votre fille, qu’il faut savoir élaguer quelques fleurs de l’enfance pour amener de bons fruits à maturité.

Ce qui a cinq pétales et beaucoup de petites étamines est sans contredit de la famille des rosacées, dont nous parlerons en son temps ; mais une si courte description ne suffit pas pour déterminer le genre et l’espèce. Cependant, si la fleur est jaune, comme je le soupçonne, je puis vous dire que c’est une renoncule des prés. Mais je ne veux pas anticiper ici sur la troisième lettre que je vous destine sur la botanique et que vous pouvez attendre dans peu[2].

Bonjour, chère cousine ; recevez mes remerciemens au sujet de ma bonne tante, les plus tendres salutations de ma femme, et faites agréer les miennes à votre cher mari.

Ce n’est pas encore le temps de faire lire les fables de La Fontaine à votre fille[3] ; mais de peur que vous ne vous en pourvoyiez d’avance, je vous préviens que j’en ai ici un exemplaire qui lui est destiné.


A Madame de Lessert.


[Paris] 30 août[4][1712].

Lorsque vous me proposâtes, chère cousine, de vous donner la connaissance de quelques plantes pour l’amusement de vos enfans, je jugeai qu’on pouvait leur rendre cet amusement utile par une étude un peu méthodique qui les accoutumât peu à peu à l’attention, à l’observation et surtout au bon raisonnement. Au lieu qu’une simple nomenclature qui ne chargerait que leur mémoire, ne les amuserait pas longtems, serait bientôt oubliée, et ne leur serait d’aucun profit après cet oubli. Je commençai donc par tâter leur goût et le vôtre par quelques notions générales des parties de la fructification où résident les caractères les

  1. Mme de Lessert avait eu en mars 1771 un second fils, — son troisième enfant, — Jacques-François-Gabriel-Étienne. Il mourut aux États-Unis, âgé de vingt et quelques années.
  2. Cette troisième lettre est datée du 16 mai 1772.
  3. Voyez, sur la question de savoir si les fables de La Fontaine conviennent aux enfans, Emile, livre II.
  4. Sans enveloppe ni adresse : cette lettre doit avoir été écrite après la cinquième lettre sur la Botanique, laquelle est du 16 juillet 1772.