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Coppens. Enfin nous arrivons pour un grand dîner d’Hondschoote et j’ai trouvé ici à mon retour sept autres invitations pareilles. Je ne me laisse pas séduire... (sic) (14 mai 1837)[1]. » Ces banquets, ces défilés dans la rue, avec musique et harangues, ces conduites à l’Hôtel de Ville... comme cela fait comprendre ce que seront les journées de 1848 dans leur décor de place publique et leur aspect forain !


L’ATTENTAT DE FIESCHI ET LES LOIS DE SEPTEMBRE

Lamartine se plaignait, dans une lettre du 3 avril 1835, que la session fût « odieusement insipide. Il n’y a ni intérêt, ni drame, ni sérieux dans tout ce que nous y faisons[2]. » Le drame allait éclater avec la machine infernale de Fieschi et passionner les débats de la Chambre. Au lendemain de l’attentat, le ministère présente trois lois de répression sur la presse, le jury et les cours d’assises. Ce sont les fameuses» lois de septembre. » Lamartine arriva le 9 août, bien décidé à intervenir dans la discussion. Pour les trois semaines qu’il passa alors à Paris, la Correspondance générale ne contient rien. Cette lacune est comblée par les lettres qui tenaient au courant Mme de Lamartine, presque jour à jour.


Paris, mercredi 13 août.

Tout va bien, ma chère Marianne, et tout ira assez vite : trois semaines environ. Seulement je ne pourrai pas m’en aller avant la fin, parce que le projet de loi sérieux, celui sur la presse, ne viendra que le dernier en discussion. Je le croyais pour hier et j’avais préparé un magnifique discours. J’en ai gardé les notes et je ferai tout au monde pour trouver le moyen de parler.

Paris est extrêmement paisible. L’homme de la machine infernale ne révèle rien, ou pas grand’chose : il demande, pour révéler, de l’argent et la vie. C’est un monstre chez qui le crime est si naturel qu’il ne se doute pas même du sien et l’a fait pour de l’argent, à ce qu’il paraît, et dit que ce n’est pas grand’chose, qu’il n’a pas cru faire un si grand mal, qu’on n’en parle donc plus ; et puis, il joue aux dominos tout le jour et se porte à merveille.

On m’a hier envoyé solliciter d’aller au château. Le Roi se plaignait de ce que je n’y avais pas paru. J’ai répondu qu’il aurait été dans mes sentimens comme dans ma nuance de loyauté politique d’y aller avec toute la Chambre au moment de l’événement, mais qu’y aller seul aujourd’hui, dans

  1. Lettres à Mme de Lamartine.
  2. A M. de Montherot (3 avril 1835).