ne sait pas distinguer entre le vrai et le faux libéralisme. Je m’attache solidement à cette espérance, que la sagesse traditionnelle de l’Église se vérifiera une fois de plus. En soi, le combat que se livrent les esprits n’est pas un malheur : tout au contraire. » Auguste Reichensperger octogénaire fut récompensé de sa certitude sereine, par l’issue que donnait au combat l’octogénaire Léon XIII.
Harcelé d’une multitude d’avis, l’épiscopat se recueillait. Que des catholiques éprouvés, à qui l’on ne pouvait imputer aucune théorie subversive, soit en théologie soit en droit canon, et qui de vieille date défendaient l’Église dans les assemblées politiques, risquassent des réserves anxieuses, c’était là un fait très grave, et que des pasteurs d’âmes, responsables de la marche du concile, ne pouvaient négliger. Un autre symptôme excitait l’émoi : on savait de bonne source que certains représentans illustres de l’école théologique de Mayence, école « romaniste, » école « scolastique, » réputaient inopportune, eux aussi, la définition de l’infaillibilité. L’adresse de Berlin prouvait que le projet de définition déplaisait aux avocats politiques de l’Église, et les inquiétudes qu’inspirait ce projet à des hommes comme Ketteler, comme Moufang, comme Heinrich, révélaient qu’il était frappé de disgrâce par ceux-là mêmes qui avaient le plus vigoureusement combattu l’école de Munich.
« Dans notre temps, écrivait en 1867 Ketteler à Dupanloup, il ne s’agit point d’accroître le nombre des dogmes. Plus le monde est malade des efforts de l’absolutisme, plus l’Église, qui renferme une économie si admirable dans sa hiérarchie, devra éviter toute démarche qui pourrait laisser croire qu’elle subit elle-même l’influence de cet esprit dominant. » Ketteler n’était ni un théologien de profession, ni un historien de profession ; avant de recruter en leur faveur certaines raisons historiques ou théologiques, ses doutes sur l’opportunité de la définition résultaient, chez lui, du même système d’idées au nom duquel il combattait l’omnipotence du pouvoir civil et la centralisation d’Etat, l’omnipotence du propriétaire et celle du chef d’industrie. Quelle que fût sa foi profonde dans l’assistance surnaturelle qui sauverait des périls de la toute-puissance un pape proclamé infaillible, il