Beaucoup de rivières ne peuvent se passer à gué. Les bois leur sont interdits, car, derrière chaque arbre, peut se trouver une carabine. Lorsqu’ils quittent les routes, leur vitesse diminue. Nulle part ils ne peuvent trouver de sécurité pour la nourriture et le repos ; même s’ils arrivent à se les procurer, que peuvent-ils faire ? casser un rail, un fil télégraphique ? l’effet sera insignifiant. Plus le nombre de pointes d’officiers sera grand, plus les pertes seront inévitables et irréparables, car les meilleurs soldats, les meilleurs officiers sont toujours employés à ce service. Ainsi une action prématurée de la cavalerie pendant la période de mobilisation et de concentration donnerait des renseignemens de faible importance. La direction des frontières, le tracé des chemins de fer, les emplacemens des troupes en temps de paix donnent aux états-majors des renseignemens autrement précieux. En y joignant le service d’espionnage, les conditions politiques du moment, les indiscrétions de la presse, le commandement est en état de prévoir, avec un certain degré de précision, la situation générale. Mais il est entendu que, pendant cette période, la cavalerie doit, dès la déclaration de guerre, prendre le contact de l’adversaire, le garder étroitement, et, s’il se présente une bonne occasion, en profiter aussitôt. Faire des prisonniers est toujours utile, le numéro du régiment permettant de vérifier l’exactitude des renseignemens reçus d’ailleurs. Donc en commençant, pas de masses, pas de patrouilles jetées au loin. La difficulté de remplacer les pertes de la cavalerie ne doit pas être perdue de vue, et une dérogation à ce principe ne serait justifiée que par des raisons de haute importance. Mieux vaut s’attacher à l’ennemi d’aussi près que possible, laisser ses forces montées se briser contre notre infanterie et ne chercher sa cavalerie pour l’amener à des actions décisives que lorsqu’elle s’est elle-même usée à poursuivre des avantages insignifians.
Les mouvemens par chemin de fer une fois terminés et la concentration stratégique commencée, alors seulement les reconnaissances deviennent nécessaires. Il peut cependant arriver que, pendant la première période des opérations, on soit amené à demander à la cavalerie une grande indépendance de mouvement : si, par exemple, il y a lieu de croire que l’ennemi a changé la zone de concentration primitivement choisie, ou encore, s’il faut prendre des mesures pour protéger le pays frontière contre des incursions. Les reconnaissances seront alors