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commerce : vain effort, car il est toujours facile de donner à l’opération, même commerciale, un prétexte militaire. Est-il vrai même que les torpilles automatiques soient, dès maintenant, soumises au dispositif qui les limite dans leur structure ? Non, car les nations, qui ne peuvent en réaliser les perfectionnemens, ne veulent pas renoncer à l’usage des mines, et la convention se borne à leur demander de transformer « aussitôt que possible » leur matériel. Même en cette question, si hautement humanitaire, c’est un à peu près, un « autant que possible » qui s’inscrit dans une convention platonique, plus proche du vœu que du traité.

Faute par l’Angleterre de renoncer au blocus et par l’Allemagne de renoncer à la mine, tous les progrès se trouvent, sauf en des points de détail, indéfiniment suspendus.


III

Et cependant, par l’effet de la nouvelle Conférence, si tant de points sombres demeurent à l’horizon, des éclaircies paraissent. Le sentiment croissant de l’humanité, les progrès de la justice internationale et les résultats de l’invention apportent des espérances, qui, de proche en proche, deviennent plus certaines et plus fortes.

Telle est la puissance de l’idéal humanitaire que les nations essaient, dans la mesure du possible, de le concilier avec l’intérêt national.

Un exemple entre tous est caractéristique, car il a trait au problème fondamental du respect de la propriété privée ennemie sous pavillon ennemi.

La France a la conviction que, dans une grande guerre navale, le droit d’arrêter en mer le trafic ennemi peut éventuellement lui être utile, et même nécessaire. Elle commence donc par prendre position avec l’Allemagne et la Russie contre la doctrine historique des États-Unis ; mais, tandis que l’Allemagne et la Russie éludent la question et l’ajournent, la France comprend qu’elle doit aux États-Unis, qu’elle doit à la Conférence, et plus encore à soi-même, de se justifier ici de tout soupçon d’être inhumaine. Et ce que n’avaient fait ni le baron Marschall, ni M. de Martens, M. Louis Renault le fit : il discuta. D’abord, il posa le droit