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dirigeables n’ont pas pour unique objet de lutter stérilement contre les vents, mais de se porter avec une rapidité convenable d’un point à un autre, que le moins qu’on puisse leur demander est de faire du 21 ou du 22 à l’heure et que, par conséquent, un dirigeable comme la Patrie ne peut remplir cet office qu’un jour sur sept, parce que, dans l’année, ce n’est qu’un jour sur sept que la vitesse du vent ne dépasse pas 6 mètres, on voit combien nos meilleurs ballons laissent encore à désirer. Comment remédier à cette insuffisance ?

Pour le lieutenant Crocco, elle est due à des vices fondamentaux de construction. La force motrice dont disposent ces machines étant très supérieure, toutes proportions gardées, à celle des croiseurs du même tonnage les plus rapides et les mieux établis, — et cela parce que les moteurs marins sont beaucoup plus lourds que ceux à essence, — nos dirigeables, d’après lui, devraient marcher à une allure une fois et demie plus rapide. Mais tant que le moteur, le lest et les voyageurs ne seront pas logés à l’intérieur du ballon, est-il admissible de comparer à un croiseur le système carène-stabilisateurs-gréement-nacelle ? Nous ne le pensons pas. Aussi, en attendant que le dirigeable modèle que nous promet l’éminent ingénieur italien et qui, avec un cube de 3 000 mètres, un moteur de 70 à 80 chevaux, nous donnera une vitesse propre de 19 à 20 mètres, soit construit et expérimenté, nous ne voyons — et nous ne sommes pas seuls à voir ainsi, — qu’un seul et unique moyen d’accroître la puissance des ballons dirigeables : l’augmentation de volume de leur carène, autrement dit, l’emploi des forts tonnages. Car il en est des ballons comme des navires : lorsqu’on augmente leur volume, la force ascensionnelle brute, proportionnelle à ce volume et, par suite, au cube des dimensions linéaires, augmente proportionnellement au cube de ces dimensions, tandis que la résistance à l’avancement, proportionnelle, pour une vitesse donnée, à la surface de résistance, — elle-même proportionnelle au carré des dimensions linéaires, — n’augmente que proportionnellement au carré de ces dimensions. En augmentant tout proportionnellement, on augmente donc beaucoup plus la force ascensionnelle brute que la résistance de l’air. Mais, d’un autre côté, le poids de la nacelle, du moteur, du lest, etc., ne croissent pas dans la même proportion et, même, n’augmentent que si on le veut bien. Il y a donc intérêt, au point de vue de la puissance d’un dirigeable,