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où il est allé faire visite au roi Edouard VII, et nous ne pouvons qu’être infiniment touchés des marques de sympathie qui lui sont données : elles s’adressent à lui sans doute, mais par lui à la nation française dont il est le digne représentant. L’entente cordiale, telle qu’elle a été définie une fois de plus dans les discours pleins de mesure et de tact du Roi et du Président, est aujourd’hui également populaire dans les deux pays : ils y voient l’un et l’autre une garantie de la paix avec dignité, et nul n’y peut voir autre chose. La presse allemande en témoigne pourtant quelque mauvaise humeur : pourquoi ? Lorsque l’empereur Guillaume est allé récemment en Angleterre, nous en avons éprouvé une impression de confiance et de sécurité. Il est bon, en effet, que des démonstrations de ce genre, en dissipant les malentendus, s’il y en a eu, resserrent entre les gouvernemens et les peuples les liens de leur amitié. Aucun malentendu n’existe en ce moment entre l’Angleterre et la France ; mais ce n’est pas une raison pour que les deux pays n’échangent pas entre eux ces visites de chefs d’État auxquelles l’opinion attache une importance dont, en effet, elles ne sont pas dépourvues. On pourrait ne pas en faire : puisqu’on en fait, il est à désirer qu’on en fasse assez pour leur faire perdre tout caractère trop particulier. Hier, nous le répétons, l’empereur Guillaume était en Angleterre ; aujourd’hui, c’est M. Fallières ; demain, le roi Edouard ira voir l’empereur Nicolas ; un peu plus tard, M. Fallières rendra aux souverains du Nord les visites qu’il a reçues d’eux, et il en fera une à l’empereur de Russie dans les eaux russes. Il ne faut voir dans ces démonstrations que la preuve des bons rapports qui existent entre les puissances, bons rapports dont le maintien les intéresse toutes. Au surplus, tout cela n’apprend rien à personne. On connaît notre alliance avec la Russie ; on ne connaît pas moins notre amitié avec l’Angleterre. Ces formes différentes expriment un même fait, qui est la solidarité de certains intérêts ; mais ce fait ne saurait porter ombrage à qui que ce soit, et c’est parce qu’il n’y a rien à en dissimuler que ces visites se produisent en pleine lumière comme une nouvelle consécration de la paix.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

FRANCIS CHARMES.