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de ses mœurs, un commerce plus étroit avec son ancienne littérature nous prouveront d’une façon irréfutable que le rôle joué par la femme au Japon est un rôle presque prépondérant. Un de ses plus fameux souverains dont la mémoire est encore de nos jours généralement vénérée dans tout le Japon était une femme, l’impératrice Jingo, qui la première fit la conquête de la Corée. Dans le champ si fécond de la littérature nationale, la première place est souvent accordée au sexe faible. Les vers d’Ono-no-Komachi ont été proclamés les plus parfaits. Nous devons noter aussi que la prose, et surtout la poésie, furent cultivées d’abord par les femmes. Le roman classique si connu, Gengi-Monogatari, est dû à une femme célèbre, Murasaki-Shikiba. Un autre chef-d’œuvre littéraire de la grande période Ingiwara, appelé Makura-no-Soshi, fut également écrit par une dame de la Cour nommée Sei-Shonegon. Ces seuls faits prouvent suffisamment la haute situation occupée par le sexe faible dans la vieille société, et l’on pourrait citer bien des cas. où une femme a réussi à atteindre, par ses propres efforts, une haute position sociale.

Mais c’est surtout comme fille dévouée, épouse modèle et tendre mère, que la Japonaise a acquis des droits au respect général. Son influence s’est accrue par la pratique des vertus familiales. Dans sa maison, c’était une puissance, et, dans la famille, ses volontés étaient toujours respectées. De nos jours encore, elle est surtout prudente, discrète et douce, mais ferme et persévérante, et très capable de défendre son autorité. Par sa douceur et son tact, elle arrive à gouverner son mari, même lorsqu’il est d’un caractère difficile, et elle obtient de ses enfans un respect qu’ils gardent toute leur vie. Vive et intelligente de sa nature, elle sait que le lien le plus solide pour consolider son influence est l’affection ; ses enfans, en grandissant, la considèrent comme leur meilleure amie. Elle commence par être leur camarade de jeux, et finit par devenir leur confidente. Elle soigne les malades et console les malheureux. En échange de son dévouement, on lui voue, non seulement une affection sans bornes, mais la plus pieuse vénération. Pour comprendre la position occupée par la femme au Japon, dans la vie privée et sociale, ou du moins la position qu’elle doit occuper et que ses qualités la rendent capable de tenir, on n’a qu’à consulter les vieux contes populaires, les romans et les biographies. Là, nous pouvons voir quelle est sa véritable mission. Le drame historique,