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pourrait-elle pas dire ? « Les origines et les causes des maladies ont été par moi pénétrées : la sûreté du diagnostic est absolue dans la plupart des cas ; toutes les douleurs sont apaisées ; quelques maladies sont guéries ; des médicamens admirables ont été inventés ; les opérations les plus graves sont sans douleur et sans danger ; la mortalité a diminué dans des proportions considérables ; et elle diminuerait bien plus encore si l’on avait le courage de faire marcher de pair les découvertes de la science et les règlemens de l’hygiène publique. N’amoindrissez donc pas mon influence, car elle s’exerce pour le bien des hommes. Faites-moi une plus large part ; multipliez mes ressources d’investigations ; suivez mes prescriptions ; et vous verrez les pires misères humaines décroître rapidement. Si je ne puis rien contre la vieillesse, ni la mort, auxquelles tout être vivant est fatalement soumis, au moins pourrai-je combattre efficacement la maladie. J’en ferai disparaître beaucoup ; je les atténuerai toutes, et j’en guérirai quelques-unes. »


II. — LES MÉDECINS

On n’attaque pas seulement la médecine : on attaque les médecins. On les accuse tantôt d’ignorance, tantôt de vénalité, et quelquefois on joint les deux reproches l’un à l’autre. Voyons un peu ce qu’il faut en penser.

Il est certain que les vingt mille médecins de France ne sont pas tous des savans hors ligne, ni même d’éminens cliniciens, ni même de bons praticiens. Vouloir que tous ces vingt mille docteurs en médecine fussent experts et impeccables en leur art, ce serait de la pure folie. La médecine exige un ensemble de connaissances véritablement formidable, et une intelligence exceptionnelle. Or, dans la profession médicale, ni l’instruction, ni l’intelligence ne sont exceptionnelles : elles sont là ce qu’elles sont ailleurs, ni moins, ni plus. Le recrutement des étudians en médecine ne porte pas sur une élite, comme lorsqu’il s’agit des élèves de l’École polytechnique ou de l’Église normale. Bien entendu, on pourrait m’opposer de brillantes et nombreuses exceptions ; mais, d’une manière générale, les jeunes étudians en médecine sont au niveau moyen de leur génération, comme les élèves de l’Église de droit, de l’Église centrale, de Saint-Cyr, de l’Église des mines.