qu’il apportera un jour à la carte d’Europe, ne semblent devoir menacer aucun de nos intérêts.
Dans la crise actuelle, la France est d’autant mieux en mesure de faire entendre sa voix qu’elle ne peut avoir, en Orient, aucune ambition territoriale, et qu’elle a de bonnes relations avec toutes les puissances. Nous ne devons chercher, dans les difficultés qui peuvent se produire en Orient, que l’occasion de faire prédominer notre politique de paix, de justice et d’équilibre ; nous ne sommes contre personne ; nous ne cherchons à isoler personne ; nous nous servons au contraire de nos alliances et de nos amitiés pour faire régner, parmi les puissances, l’harmonie que tous les peuples souhaitent. Cette méthode n’est pas une politique négative, une politique d’abstention ; elle comporte au contraire des initiatives opportunes, et elle peut nous conduire, si elle est appliquée avec prudence, mais sans pusillanimité, à jouer un rôle très honorable et très utile d’arbitrage et même de direction. Entre Londres et Berlin, sa situation géographique permanente et sa situation diplomatique actuelle invitent la France à remplir, de concert avec la Russie, une mission de contrepoids, d’équilibre et d’harmonie.
Le moment est venu où chacun doit prendre ses positions en vue de la crise qui commence. Nous avons vu qu’il reste, dans les questions qui se posent en Orient, des inconnues redoutables ; une inquiétude générale pèse sur l’Europe. Il est donc plus que jamais nécessaire d’être prêt à toutes les éventualités, d’avoir l’œil ouvert et les mains libres. Tout se tient dans la politique européenne : la clef de la question marocaine n’est pas chez les Chaouias, elle est partout où les intérêts des grandes puissances sont en suspens ou en conflit.
RENE PINON.