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semblent corroborer cette présomption. A Londres, plusieurs émigrés fabriquaient, en ce moment, de la monnaie française que leurs émissaires répandaient dans Paris. Avec les machines infernales, les attaques de diligences et le pillage des caisses publiques, — le faux monnayage était un procédé de guerre civile en honneur chez les royalistes : la pièce fourrée portait en elle sa marque de provenance. Or, Nicolas avait souvent ses poches pleines d’écus de plomb, de jaunets mal sonnans qu’il ordonnait à ses complices de mettre en circulation. Et d’ailleurs, pour un patriote travaillant au salut de la République, notre homme tenait un singulier langage. Il parlait avec déférence des Bourbons proscrits, vantait les hautes vertus de Monsieur, frère du Roi, annonçait la prochaine arrivée de ce Charles-Philippe que d’enthousiastes Chouans appelaient déjà Charles X. Clément, Truck, ni peut-être Bernard ne prenaient ombrage de semblables propos. Après tout, croyaient-ils, le frère de Capet nous rendra nos épaulettes : donc « Vive la République et vive aussi le Roi !… » Ils n’étaient point les seuls à raisonner de la sorte.

Lui aussi, Nicolas voulait la mise à mort de Bonaparte. Il estimait, sans doute, œuvre méritoire, l’exécution publique de l’usurpateur, dans la cour des Tuileries, sous les fenêtres d’un château que souillait sa présence… Quel spectacle, ô Français, quel exemple, quelle leçon !…

Ainsi devait philosopher ce moraliste ; mais le tirage au sort de l’exécuteur lui semblait une opération périlleuse. Il eût préféré se servir d’un bourreau à gages, Brutus payé argent comptant. Les Brutus n’ayant son ni maille abondaient à Paris : moyennant un modique salaire, il espérait se procurer un « dernier Romain. » Cette expression, jadis toute jacobine, était devenue d’un fréquent emploi chez les royalistes. Dans son journal d’ordures, l’Ambigu, Peltier réclame, pour frapper le « singe vert, » — c’est-à-dire : Buonaparte, — Brutus et son classique poignard :


O Rome, en ton destin funeste,
Pour te venger, du moins il reste
Le poignard du dernier Romain !


L’ingénieux Nicolas cherchait donc son dernier Romain, mais un Romain dans les prix doux. Il le voulait fidèle, loyal, désintéressé, ayant l’intelligence de son grand devoir, la notion