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changer. Nous avons rendu justice autrefois aux efforts qu’a multipliés M. Briand pour amener l’Église catholique à la conciliation ; nous continuons de croire qu’il était parfaitement sincère ; mais il employait, alors, bien qu’il n’ait pas réussi, des argumens plus habiles que ceux d’aujourd’hui. On a pu croire, dans certains passages de son discours au Sénat, qu’il regrettait de n’avoir pas vu établir une Église gallicane dont l’indépendance aurait été une limite pour Rome. N’est-ce pas expliquer la résistance de celle-ci ? N’est-ce pas surtout s’exposer à la perpétuer et à la fortifier ? Au surplus, tout cela n’avait aucun rapport immédiat avec la discussion actuelle. Il ne s’agissait plus de savoir si le Pape avait eu tort ou raison d’interdire les associations cultuelles, mais de déterminer quel serait le sort des biens en l’absence de ces associations. Une partie de ces biens aurait fort bien pu faire retour, soit au clergé, soit aux catholiques, sous des formes diverses. Ce qu’on vient de faire pour certaines fondations pieuses, qu’on a sans doute jugées plus intéressantes que les autres, on aurait pu le faire pour quelques-unes de celles-ci. On ne l’a pas fait parce qu’on ne l’a pas voulu, parce que le scandale de la confiscation a paru moins grand lorsqu’elle ne s’exerçait pas contre les morts parce que l’émotion des consciences a été moins vive, parce que les exigences de l’opinion se sont montrées moins impérieuses. Mais qu’on ne nous parle pas d’impossibilité. M. Briand a commencé par en parler pour les morts, aussi bien que pour les vivans ; il a invoqué les mêmes principes contre ceux-là que contre ceux-ci ; il a cédé toutefois lorsqu’il s’est aperçu que la majorité du Sénat ne le suivait pas. Il s’est ravisé alors et on a trouvé aussitôt l’organe de transmission qui permettait de respecter les fondations faites au profit des morts.

Deux amendemens étaient en présence : l’un était présenté par M. Chaumié, l’autre par M. Philippe Berger. Le premier était certainement le meilleur, mais M. Briand a préféré le second. M. Chaumié proposait tout simplement qu’une somme afférente aux fondations pieuses fût prélevée sur les biens transmis aux départemens ou aux communes, et mise à la disposition des prêtres qui officient dans les églises. M. Lhopiteau avait proposé quelque chose d’analogue à la Chambre et M. Briand l’avait combattu : il semble bien que ce soit pour ce seul motif qu’il Ta combattu aussi au Sénat ; il n’a pas voulu se déjuger. — Depuis la séparation, a-t-il dit, nous ne connaissons plus les prêtres catholiques ; ils n’existent pas pour nous ; nous ne pouvons pas avoir plus de rapports avec eux qu’avec le néant, et cette