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demi-milliard de marks, elle paie un impôt de 5 p. 100 sur l’excédent. Le législateur a pensé, d’après l’expérience acquise, que cette faculté donnée à la banque d’avoir une circulation triple de son avoir métallique était suffisante pour les besoins du pays, et il a mis un frein à la création excessive de papier non couvert par des espèces en imposant la taxe de 5 p. 100 à partir d’un certain niveau. En effet la Reichsbank et les autres instituts d’émission ne sont amenés à créer et à maintenir en circulation des billets pour un montant qui dépasse leur encaisse et leur contingent, que si le taux d’escompte est d’au moins 5 p. 100, limite au-dessous de laquelle ils travailleraient à perte.

Ces détails sont importans à connaître, car la Reichsbank est le pivot des affaires en Allemagne, comme la Banque de France l’est pour les nôtres. Et, bien que le système démission et l’organisation des deux établissemens soient très différens, ils jouent l’un et l’autre un rôle primordial : c’est vers eux que tous les regards se tournent en temps de crise, c’est sur leur conduite que les autres banques du pays règlent la leur, c’est elles qui déterminent ou du moins qui indiquent, par la fixation de leurs taux d’escompte et d’avances, le prix du loyer des capitaux. Or toute crise se traduit par une élévation de ce loyer, qui est le baromètre de la situation économique.

La caractéristique de l’année 1907 a été en Allemagne, comme dans le reste du monde, un renchérissement extrême des taux d’intérêt. Ce renchérissement s’est marqué tout d’abord dans le prix des capitaux flottans, c’est-à-dire de ceux qui s’emploient en escompte de papier de commerce, en avances sur titres, en reports à la Bourse. Ces capitaux sont ceux dont le prix subit les oscillations les plus vives et traduit le mieux la situation générale. Le fait que les possesseurs ne s’en dessaisissent que pour une courte période leur permet de modifier incessamment les conditions auxquelles ils les prêtent ; au contraire, les taux des placemens faits à plus longue échéance ne sont pas susceptibles de variations aussi brusques : ils finissent cependant, lorsque la période de cherté des capitaux flottans se prolonge, par être influencés à leur tour, et cela dans l’ordre suivant. Les placemens en valeurs mobilières à revenu fixe, fonds d’État, obligations industrielles de toute nature, sont les seconds à se ressentir de la cherté de l’argent ; comme ces titres se négocient aisément sur des marchés considérables et donnent lieu à