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hauteurs. En réalité, c’est lui qui renaît avec la race, et dont la sagesse triomphe de nouveau, après des siècles d’oppression et de ténèbres… Se scandalise qui voudra ! J’estime que les flonflons des trombones, les fusées des feux d’artifice, le tumulte des casinos et des chemins de fer, — cette confuse clameur d’un peuple qui cherche ses voies et qui se précipite vers la vie, cela glorifie mieux Pallas-Athéné que toutes les phrases d’un Renan…


Mais le gardien, qui s’impatiente, lance des appels impératifs et nous rabat vers la sortie. À tâtons, on redescend l’escalier monumental, dont les marches glissantes se dérobent sous le pied.

Hors de l’enceinte, parmi les roches encore tièdes de la chaleur diurne, l’atmosphère paraît plus étouffante. Les chouettes de la déesse mises en émoi par la canicule poussent d’étranges cris d’amour, en se cognant contre les vieux murs. En face, sur les blocs de l’Aréopage, où les Erinnyes poursuivirent Oreste parricide, des voyous pincent des guitares et glapissent des airs napolitains défigurés. Grisés par la belle nuit, ils chantent à la lune, éperdument.

Partout, on marche sur des gens roulés dans des couvertures, qui se sont installés parmi les décombres, pour dormir. Si les portes de l’Acropole n’étaient pas fermées par les soins de j’Ephorie, toute l’Athènes populaire y ferait ses dortoirs d’été. On se coucherait, comme autrefois, sur le seuil des temples, et l’on aurait, là-haut, le merveilleux réveil que j’ai vainement espéré.

Derrière le Parthénon, il y a un trou envahi par les pierrailles et les herbes sèches, où se tapit une bâtisse quelconque, une sorte de maison d’école sans air ni lumière : ce lieu sinistre, c’est le Musée de l’Acropole.

Quelle horreur ! — et pourquoi faut-il que la vieillesse de l’art soit la proie de la science ? Comme si les débris qu’on a emmagasinés dans cet étouffoir ne seraient pas cent fois mieux au grand jour du dehors ! À Cherchell, j’ai vu un musée en plein air, une collection de statues installées tout simplement dans une cour, — et ce spectacle m’a rempli de joie. Les marbres réchauffés