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L’AME ÉPARSE


Je me suis demandé souvent
Où s’en vont les âmes subtiles
Des mots, des gestes inutiles,
Des songes fous, vains ou futiles,
Du rêve illusoire et fervent ;

Des heures d’amour oubliées,
Des promesses et des sermens
Dont se bercèrent les amans,
Des étreintes aux bras charmans
Par la fatigue déliées…

Car de tout ce qui vibre en nous
Je crois qu’un peu d’âme subsiste,
Tel un souvenir qui persiste
Indifférent, joyeux ou triste,
Tel un parfum tenace et doux.

Je crois que tout se manifeste
Au-delà de nos faibles yeux
Dans un monde mystérieux
Et que, dans le livre des dieux,
Chaque regret s’imprime et reste !


LE BONHEUR


Qu’est-ce que le Bonheur que l’on poursuit sans trêve
Le Bonheur inconnu, magique, décevant ; —
Illusion suprême, espoir toujours vivant,
Vaste comme le monde et vague comme un rêve…

Qu’est-ce que le Bonheur ? Est-ce l’amour fervent,
L’amour né d’un sourire et qu’une larme achève ?
Est-ce l’humaine gloire impondérable et brève,
Ou n’est-ce qu’un fétu balayé par le vent ?…