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passent pas pour très scrupuleux, où les comptes-matières ont révélé, lors de la guerre récente, des vides un peu déconcertans, peut-on se fier aux comptes-espèces, à des chiffres qui jusqu’ici ne passaient pas au crible des débats contradictoires de la tribune ou de la presse ?

Or un examen attentif prouve : que les chiffres publiés sur les résultats financiers sont exacts, qu’ils peuvent servir de base à une appréciation du crédit russe. Avant l’octroi par le Tsar de garanties constitutionnelles, le budget, établi par le ministre des Finances, était soumis à l’examen du Conseil de l’Empire. Dans cette assemblée de hauts fonctionnaires, « le département de l’Economie » jouait le rôle dévolu dans les pays parlementaires à la commission du budget ; il discutait avec le ministre le budget qui, une fois voté, était soumis à la signature du Tsar vers le 15 décembre de chaque année. Le Conseil de l’Empire, qui jouissait d’une grande indépendance et dont les votes étaient toujours respectés, était en même temps chargé de vérifier le compte de caisse du ministre des Finances et celui du « contrôleur général. »

Ce personnage, chef suprême d’une administration qui tient à la fois de notre Cour des comptes et de notre corps d’inspection des finances, a rang de ministre. De lui dépendent les « chambres de contrôle » qui, dans chaque province, révisent les documens justificatifs des recettes et des paiemens effectués et surveillent les opérations de diverse nature où sont engagés les deniers publics. Elles peuvent éplucher les pièces qui leur sont soumises et, comme un tribunal ordinaire, condamner à réparation pécuniaire les auteurs d’un préjudice causé à l’État. Le contrôle de l’Empire a des représentans à la Banque de Russie, aux banques de la noblesse et des paysans et dans les usines des chemins de fer. C’est d’après cette comptabilité des chambres provinciales, centralisée par lui, que le contrôle général établit les résultats définitifs de l’exercice, qui doivent concorder avec le compte de caisse tenu par le ministre des Finances.

Les résultats, livrés annuellement à la publicité, permettent de s’assurer, au moyen d’une opération très simple, que les comptes ainsi certifiés sont bien exacts. L’on y trouve en effet, outre le détail des recettes et des dépenses, le montant de l’encaisse de l’Etat au début et à la fin de chaque année. Soit que cette encaisse ait augmenté ou diminué durant l’exercice, le total des