Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 44.djvu/430

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le XXe siècle débutait au Sahara sous d’heureux auspices. La limite de notre action dans le Sud-Ouest se trouvait reculée de 400 kilomètres ; aux yeux des Touaregs, le massacre de la mission Flatters recevait enfin le châtiment mérité ; en même temps, achevant sa traversée du désert, la mission Foureau-Lamy s’avançait vers le Tchad.

Restait à dégager la route du Touat, seul moyen de ramener la sécurité dans les Oasis sahariennes. D’importantes colonnes furent mises en mouvement. L’une d’elles se porta sur le Tidikelt, où fut livré le combat acharné d’In-Rhar (19 mars 1900). Une autre s’empara sans coup férir d’Igli au confluent du Guir et de la Zousfana (5 avril) ; d’autres unités occupèrent le Gourara[1]. Quant au Touat, il était réservé au général Servière, mis à la tête de la division d’Alger, de le traverser dans sa longueur avec une faible escorte en revenant du Tidikelt. Le commandant Laquière nous a donné de cette tournée (mai-août 1900) et de celle que le général entreprit l’année suivante une excellente relation[2].

Après l’occupation vint l’organisation. Des garnisons furent installées dans la Zousfana, la Saoura, le Gourara et le Touat.

Dans leur ensemble, ces mesures ont été vivement commentées. On s’est demandé pourquoi, avant d’atteindre les oasis, nous n’avions pas commencé par nous assurer la possession de la vallée qui y conduit ; pourquoi nous n’avions pas réduit d’abord à l’impuissance les Ouled Djerir de la Zousfana, les Douï-Menia de l’oued Guir et les Berabers du Tafilalet, dont les incursions incessantes nous tenaient sur le qui-vive. Avant toute autre chose » ne devions-nous pas occuper ce couloir de la Saoura qui unit comme un mince pédoncule le Touat aux régions du Sud-Marocain ? « — Quand on veut cueillir une poire, écrivait M. de Caix, on la prend par la queue. »

On ne critiquait pas moins les épreuves excessives que, dans la crainte de complications diplomatiques, nous imposions à nos troupes, sous un soleil de feu, sur un sol aride où les difficultés de la marche étaient encore aggravées par le manque d’eau. Enfin, on s’en prenait à ces envois de renforts disproportionnés, à ces lourdes colonnes, paralysées dans leurs mouvemens, et qui faisaient regretter les colonnes volantes de notre vieille armée

  1. La Pénétration saharienne, p. 154 et 209.
  2. Bulletin du Comité de l’Afrique française, supplément de janvier 1902.