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Il serait toutefois exagéré de prétendre que la question de la Saoura et des Oasis sahariennes n’avait pas fait un pas depuis la mission Colonieu. L’insurrection de Dou Amama nous avait amenés dans la région de Figuig, dont le capitaine de Castries avait dressé la carte. Le poste d’Aïn Sefra était créé. Insensiblement, le rail allait tourner l’obstacle que l’Erg occidental opposait à notre pénétration. Au surplus, notre enquête sur les oasis se poursuivait. MM. Le Chatelier, Déporter, Sabatier groupaient des renseignemens sur le Touat et le Tidikelt, qui finissaient par intéresser l’opinion. La déclaration franco-anglaise de 1890, en reconnaissant à la France une zone d’influence au Sud de ses possessions méditerranéennes jusqu’à la ligne Say-Barroua entre Niger et Tchad, fournit un argument aux partisans d’une action sur le Touat. Malgré les représentations de M. Jules Cambon[1], on se contenta de renforcer nos postes du Sud. Entre les mailles de ces postes passèrent et repassèrent les rezzous et trop souvent nos troupes de relève durent s’en garer. D’énergiques protestations se firent entendre. « On ne tient pas les nomades avec des bordjs, écrit M. de Castries[2]. On ne les tient que par le ventre, » et il conclut à la nécessité pour la France de mettre la main sur les centres de ravitaillement, dans l’espèce, sur In Salah et les Oasis sahariennes.

L’occasion s’offrit le 28 décembre 1899. M. le professeur Flamand, connu par ses travaux géologiques dans le Sud-oranais, avait été chargé de poursuivre ses recherches dans la partie du Sahara comprise entre le Sud de la province d’Alger et le Tidikelt. Le goum du capitaine Pein, fort de 140 méharistes qui avaient déjà fait leurs preuves en escortant la mission Foureau-Lamy, remonta avec M. Flamand l’oued Mya et contourna le plateau de Tadmayt. Attaquée à l’improviste par 1200 fanatiques, cette troupe entraînée les repoussa à Iguesten ; puis, dans une deuxième rencontre, avec l’appui des spahis du capitaine Germain accourus en toute hâte, elle brisa la résistance des ksouriens et reçut la soumission de la région d’In Salah, foyer des insurrections qui se tramaient depuis cinquante ans contre nous.

  1. La Pénétration saharienne, par MM. Bernard et Lacroix, p. 113. — Documens pour servir à l’étude du N.-O. africain, par MM. P. de la Martinière et Lacroix.
  2. Journal des Débats du 17 février 1899.