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empruntée. La seconde n’était connue que par renseignemens, le major Laing ayant payé de sa vie son entreprise et René Caillié ayant tracé beaucoup plus à l’Ouest son itinéraire de Tombouctou au Maroc.

On pourrait s’étonner que le commandant Colonieu n’ait pas cité comme voie de pénétration l’oued Igharghar[1], ce fleuve mort, dont la mission Foureau-Lamy suivit en partie la vallée avant de se diriger vers l’Aïr ; mais il faut remarquer que les amoncellemens des sables de l’Erg oriental semblaient défier tous les efforts. L’Igharghar, issu du massif central de l’Ahaggar, s’écoule vers le Nord ; son lit desséché, qu’un entassement de dunes recouvre plus en aval, se prolonge jusqu’à la dépression du chott Melghir. Son bassin inférieur, peu éloigné des montagnes de l’Aurès, est garni de palmeraies qui, politiquement, font des oasis de l’oued Rir une annexe de l’Algérie, tandis qu’entre ces oasis et l’Aïr, un gros obstacle aride et sablonneux semble barrer la route[2].

La voie de l’Ouest se présente dans des conditions diamétralement opposées. Les eaux, qui l’ont creusée, coulent vers le Sud, et, de ce fait, tout se trouve interverti. Alors que l’Erg oriental recouvre l’Igharghar au sortir des hautes terres du Sahara central, laissant au Nord se développer une région d’oasis, l’Erg occidental s’interpose entre la zone algérienne et les oasis du Sud, dites Oasis sahariennes. Celles-ci, qui sont la contre-partie de l’oued Rir et du chott Melghir, reçoivent bien, en définitive, dans les années pluvieuses, les ruissellemens des Hauts Plateaux algériens ; mais les oueds qui les véhiculent, le long des pentes, dans leur cours supérieur, disparaissent presque aussitôt sous les dunes pour ne reparaître que plus bas. Seul, l’oued Saoura, dont les têtes sortent des chênes de l’Atlas, offre l’aspect d’une vallée continue. Il crée dans le Touat une « rue d’oasis ; » puis, si on adopte l’hypothèse de M. E.-F. Gautier, il tourne au Sud-Ouest et, sous le nom d’oued Messaoud, va se perdre dans une cuvette lacustre encore mal définie.

Ouverte sur le Tafilalet et le grand Atlas, cette vallée fut à

  1. Il existe bien d’autres pistes, directes ou détournées, reliant la Méditerranée au Soudan, entre l’Ouest marocain et l’Est tripolitain. Quelques-unes, comme celles de l’oued Draa à Taoudéni et de l’Ouadaï à la Cyrénaïque, servent encore à la traite des Noirs, mais n’aboutissent pas au territoire français. Une étude sur le commerce saharien comporterait l’examen de ces différentes voies.
  2. Bulletin de la Société de géographie d’Alger, 1906, page 388 et suivantes.