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le séminaire de Trêves, sous la houlette d’Arnoldi, fut un foyer de Güntherianisme plus actif que beaucoup d’universités.

Mais, dans l’Allemagne d’alors, deux grandes considérations dominaient le débat. D’une part, les évêques, réunis à Wurzbourg en 1848, avaient affirmé leur droit et leur devoir de veiller de plus près sur l’éducation sacerdotale ; et sans faire acte d’hostilité contre les facultés de théologie, ils avaient envisagé, conformément aux prescriptions de Trente, l’établissement de grands séminaires ; puis la conférence de l’épiscopat bavarois, tenue à Freising en 1850, avait repris la question, qui, du reste, en présence de l’opposition de Doellinger, n’avait pas été résolue ; enfin lorsque en 1851 Ketteler avait ouvert un séminaire à Mayence, Pie IX l’avait chaleureusement félicité.

D’autre part, les universités rencontraient des avocats compromettans : tel ce Lütterbeck, ancien professeur à Giessen, qui expliquait en 1860 que le Pape et les évêques voulaient multiplier les séminaires pour « recruter une troupe de sectateurs aveuglément dévoués ; » et tel aussi, tel surtout, Doellinger, qui présentait l’existence des facultés de théologie comme la conséquence pratique de ses propres maximes sur la liberté de cette science. Dès l’instant que la défense de ces facultés s’appuyait sur certaines doctrines qui restreignaient au profit des professeurs les droits du magistère ecclésiastique, ce magistère devait trouver, dans les plaidoiries mêmes dont ces institutions étaient l’objet, les élémens d’un réquisitoire.

D’autant que les universités avaient des ennemis imperturbables, qui suivaient avec vigilance tous les incidens fâcheux : la nomination de Knoodt comme recteur à Bonn au lendemain de sa condamnation par Rome ; la nomination de Baltzer, autre victime de l’Index, comme docteur en philosophie de l’Université de Breslau ; le geste provocateur de la faculté de théologie de Breslau, nommant docteurs, sans que Rome lui en eût donné le droit, neuf personnages dont la plupart étaient des günthériens déterminés ; les tergiversations de Baltzer condamné, se cramponnant, malgré l’évêque Foerster, à sa chaire de Breslau ; le découragement de l’évêque Foerster, qui finissait par rêver d’avoir un séminaire ; les difficultés de Geissel pour faire nommer à Bonn, après la condamnation de Knoodt, un professeur de philosophie orthodoxe ; et la crainte incessante des évêques que les professeurs dont ils blâmeraient l’enseignement ne fussent