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chargeait de rapporter, à ceux dont il était l’envoyé, les réponses contenues sous la même enveloppe.

M. Berryer, lui, n’est pas doué d’un cœur téméraire ; il se tint pour fort satisfait de se retirer sain et sauf d’un si absurde guêpier, et reprit la route de Paris.

La relation précédente m’est arrivée, avec tous ses détails, d’une façon si directe, dans le temps, que je ne puis douter que ce ne soit la première version fournie par M. Berryer à ses commettans. Peut-être en a-t-il changé depuis ; cela arrive à tous les gens de parti, et à lui plus qu’aux autres.

Il paraîtrait que le maréchal Bourmont, aiguillonné au vif du sarcasme amer de la princesse, avait dit comme un autre Pylade : « Allons, seigneur, enlevons Hermione, » et s’était réuni aux conseillers imberbes de Marie-Caroline.

Peut-être aussi les espérances d’un mouvement insurrectionnel à Paris avaient-elles encouragé, et servi à combattre les objections des moins extravagans ; quoi qu’il en soit, les projets de retraite furent échangés contre ceux de l’entrée en campagne.

Mme la duchesse de Berry, à la tête de quinze cents paysans réunis à grand’peine, les vit mettre en fuite, malgré sa présence et malgré des actes de valeur individuelle remarquables, par une poignée de soldats réguliers.

Ce qui restait de sa troupe se réfugia dans le château de la Pénissière[1] où elle fut poursuivie. On parvint, au moment de l’attaque, à en faire évader la princesse ; et bien des braves gens périrent par le fer et le feu pour assurer sa sûreté.

Ses partisans de Paris conçurent de vives alarmes. Ils furent plusieurs jours à la savoir entrée au château de la Pénissière, où tout avait péri, sans connaître son évasion. On a nié depuis qu’elle fût à la Pénissière lors de l’attaque ; je n’ai point là-dessus de notion exactement positive.

Pendant ce temps, M. Berryer était arrêté à Angoulême. Comme je n’écris, ainsi que je l’ai souvent répété, que d’après mes souvenirs et sans consulter de documens, je ne saurais me rappeler lesquels de ces événemens ont précédé. Mais ils se sont succédé de fort près et de façon à expliquer les terreurs dont M. Berryer se sentit immédiatement atteint lorsqu’il se vit

  1. La prise du château de la Pénissière est du 6 juin 1832.