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fait d’électricité, cela était presque entièrement imputable à l’opposition que cette industrie a éprouvée de la part des municipalités[1]. »


IV

J’entends bien qu’on nous dira que c’est un point de vue démodé, réactionnaire, en ces temps « sociaux, » que ce point de vue « économique. » S’il en est ainsi, on nous permettra de le regretter, car, à supposer que l’on ait tort de chercher, comme on l’a fait trop longtemps, dans la science ou plutôt dans l’ordre économique, un idéal ou un but en soi, une règle d’action qui serait forcément toujours brutale et trop souvent contraire à la simple charité chrétienne, on n’en a pas moins tort quand on veut aujourd’hui repousser ou supprimer ce point de vue, quand on refuse d’y voir ce qui y est réellement, ce qu’il y a de mieux fait pour guider notre inexpérience et aider notre bonne volonté, à savoir « l’esprit des lois » économiques, lois fatales, bien que trop souvent oubliées, dont on ne supprime pas les effets à les vouloir négliger, et dont le jeu logique et imprévu ruine parfois les tentatives les mieux intentionnées… Quoi qu’il en soit, demandons-nous maintenant quels ont été en Angleterre, au point de vue social, les résultats du municipalisme.

Il a pour but et pour raison le « mieux-être » social, l’amélioration des conditions de vie de la classe la plus nombreuse dans les villes. Il existe par et pour la démocratie urbaine : il a donc dû lui profiter. Certes, il lui a profité. Mais dans quelle mesure ? Et jusqu’à quel point son action bienfaisante n’a-t-elle pas été contre-balancée par des conséquences socialement et politiquement néfastes ?

Les industries municipalisées offrent, dit-on, au public un service meilleur et à meilleur marché. Un meilleur service ? Peut-être. Les municipalités, par exemple, s’efforceront de mieux satisfaire aux besoins et aux convenances des quartiers populeux ou excentriques, en fait de transports, d’éclairage, etc. La question d’argent est pour elles accessoire : ce qui prime tout à leurs yeux, c’est l’intérêt de la communauté, de la communauté pauvre surtout, tandis qu’un industriel pensera d’abord et

  1. Darwin, op. cit., 296.