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prospérité ? Au premier abord, on reste perplexe : mais si on réfléchit qu’un choix judicieux des entreprises nous fera porter nos capitaux vers celles qui promettent, non seulement un revenu rémunérateur, mais une plus-value de capital, et, que de plus nous devons avoir soin de n’acheter que des titres ayant un large marché dans leur pays d’origine, de façon à pouvoir les y revendre en cas de besoin, on arrivera à la conclusion qu’il y a de bonnes raisons pour ne pas rayer l’Allemagne de la liste des pays où nous cherchons à faire fructifier une partie de notre épargne.


Plus nous réfléchissons et plus il nous apparaît que la crise de 1907 a été pour nos voisins une épreuve normale, provoquée par l’inévitable ralentissement des affaires qui suit une période exceptionnellement prospère, et qui n’a que de lointains rapports avec ce qui s’est passé à la même date dans d’autres pays, où des élémens malsains sont venus compliquer et aggraver la situation. L’expansion formidable de l’industrie germanique a tendu à l’excès les ressorts du marché monétaire ; elle a fréquemment abusé du crédit : mais le mécanisme dans son ensemble a bien résisté ; pas une société de crédit importante n’a été arrêtée dans sa marche, et la détente que les bilans de la Reichsbank accusent au début de l’année actuelle prouve que le cap des tempêtes est doublé. En dépit d’ailleurs des théoriciens de l’école de Malthus, nous ne pouvons considérer comme un danger pour nos voisins l’augmentation de leur population : nous la regardons au contraire comme un élément de force, non seulement au point de vue militaire, mais à celui de l’industrie pour laquelle une main-d’œuvre abondante est ainsi assurée. L’émigration elle-même, qui est très faible depuis que la prospérité s’est affirmée, mais qui pourra reprendre de l’importance si les temps deviennent difficiles et si la demande de bras persiste à se restreindre, est un excellent moyen de préparer au dehors une clientèle fidèle et de multiplier le nombre des consommateurs de produits allemands. Les sujets de préoccupation vraiment graves sont le problème des finances publiques, qui paraît toutefois susceptible d’être résolu par l’établissement d’impôts nouveaux ou le relèvement des taxes de consommation existantes, et celui du régime douanier et de l’organisation industrielle qui est en partie la conséquence de ce régime. Des industries qui