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mitif de vingt-huit jours avait été arbitrairement fixé et qu’on pouvait dès lors le modifier arbitrairement. Chacun de ces jours a son affectation à un objet déterminé et chacune de ces affectations est nécessaire. Et c’est ce qui a permis à M. de Freycinet, dans la réplique qu’il a faite à M. le président du Conseil, de dire : « Non, nous ne sommes pas séparés par quelques jours de plus ou de moins, nous sommes séparés par un principe. » Ce principe n’est autre que la nécessité de faire passer les réserves par une série d’exercices où elles retrouveront l’intégralité de leur instruction militaire, de manière qu’elles puissent, dès le jour de la mobilisation, se retrouver de plain-pied avec leurs camarades de l’armée active. M. le général Picquart avait dit à la Chambre que les armées évoluaient. M. le général Langlois a repris le mot, et il s’est demandé ce qui caractérisait l’évolution, non seulement de l’armée française, mais des autres, et notamment de l’armée allemande. Il est arrivé à une constatation de la plus haute importance, à savoir que l’armée allemande évoluait dans un sens et l’armée française dans un autre, que l’une mettait sa principale force dans ses troupes de premier choc et l’autre dans ses réserves. Des deux systèmes, on peut se demander quel est le meilleur : chacun a ses inconvéniens et ses avantages. Les avantages du second, si on sait se les assurer, sont très appréciables. M. le général Langlois a affirmé que si nous avions eu, en 1870-1871, les réserves organisées dont nous disposons aujourd’hui, nous aurions finalement gagné la partie, et M. de Freycinet a déclaré à son tour que nos réserves étaient actuellement les plus belles et les plus fortes du monde. Nous souhaitons qu’il en soit ainsi : cela nous permettrait, comme l’a dit encore M. le général Langlois, de nous relever après un début malheureux, c’est-à-dire après une bataille perdue. Mais pour cela, il faut conserver, augmenter, défendre la qualité de nos réserves. Notre armée active est plus faible que l’armée active allemande, on en convient. M. Richard Waddington, dans un discours excellent, consciencieux, scrupuleux, n’a pas dissimulé que, depuis l’application de la loi de 1905, nous avions eu des déceptions au sujet de cette armée ; nous n’avons pas trouvé le nombre de soldats rengagés qui avait été prévu, et qu’on jugeait indispensable au moment du vote de la loi. M. Waddington estime que ce défaut pourra être corrigé avec de l’argent, et M. de Freycinet ne s’en montre pas extrêmement alarmé ; mais l’un et l’autre concluent avec une égale énergie que, si nous avons fait des sacrifices d’abord sur la quantité, puis sur la qualité de notre armée active, c’est une raison de plus pour que nous