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REVUE DRAMATIQUE


VAUDEVILLE : Un divorce, pièce en trois actes par MM. Paul Bourget et André Cury. — COMEDIE-FRANÇAISE : Les Deux hommes, comédie en quatre actes, par M. Alfred Capus. — GYMNASE : Le bonheur de Jacqueline, comédie en quatre actes, par M. Paul Gavault.


Voici une de ces œuvres de grand caractère, qui sont un régal pour les connaisseurs, et devant lesquelles ceux mêmes qui ne se soucient pas d’analyser leurs impressions se sentent étreints par une émotion d’espèce particulière et de qualité rare. On ne cesse de nous redire en effet que le théâtre est le royaume de l’artifice et la terre d’élection du mensonge ; tout y est disposé d’après une optique qui fausse l’aspect des choses et on détruit les proportions ; tout y est arrangé et truqué ; les événemens y obéissent à une logique spéciale qui nous fait accepter l’invraisemblable et croire à l’absurde ; les personnages nous sont présenté d’une façon si singulière que les mêmes caractères pour lesquels nous éprouvons, à la ville, du mépris et de la répulsion, nous inspirent, à la scène, de l’estime et de la sympathie ; la morale n’y est pas seulement conventionnelle, mais elle est un ambigu de préjugés baroques qui sont les dogmes de l’endroit ; les mœurs, les usages, le ton des conversations qu’on y admet, seraient partout ailleurs pour nous surprendre ou nous choquer. Or il est bien exact que cela se passe ainsi dans beaucoup de pièces, et des plus fêtées. Mais qu’un écrivain, formé par des méthodes très différentes et maître dans un autre domaine, aborde la scène sans autre souci que celui des règles générales de l’art, Celles qui recommandent, où que ce soif, l’étude de la nature, la simplicité des moyens et la franchise de l’expression ; qu’il apporte et conserve sur ce terrain nouveau ses habitudes d’esprit, le souci des questions de