Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 43.djvu/898

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à chacune. Enfin, les allocations sollicitées dans les termes de la loi par des congréganistes indigens n’avaient donné lieu à la fin de 1906 qu’à quatre arrêtés concernant quinze personnes ; les autres attendaient.

On peut croire que ces chiffres très humbles n’ont pas été inscrits dans le rapport après les dépenses énormes d’administration et de frais de justice, ni le retard des pensions exposé après la multiplication des procédures, pour produire un contraste. Mais le contraste est si fort que M. Combes lui-même s’en est dit ému. Il est pénible pour tout le monde de penser que, dans ce pays, des millions ont été dépensés aux liquidations, tandis que des religieux et des religieuses, jetés à la rue, obtiennent à grand’peine ou même n’obtiennent point de quoi ne pas mourir de faim. À ce fait d’inhumanité on ne peut rien ajouter, car il achève de caractériser l’œuvre d’exécution. D’un mot, il est juste de dire que cette exécution a rendu pire une loi mauvaise. Contre les congrégations elle avait une libre carrière : elle n’a pas manqué de la parcourir : c’était son droit. Mais elle n’a cessé dès le premier jour de malmener les individus. Les propriétaires ont été troublés et dépossédés. Les congréganistes ont dû arracher comme par morceaux les droits que la loi leur avait donnés. Les créanciers ont été combattus avec la dernière âpreté. Pour finir, il est révélé qu’à travers cette lutte judiciaire extrêmement coûteuse, les congréganistes sont à peine secourus et que leurs pensions ne sont pas payées. Il eût suffi de beaucoup moins pour créer le malaise général qui a trouvé soudain au Sénat une expression autorisée.

On veut faire disparaître ce malaise, et cela est bien. Mais il faut pour cela deux conditions. A l’avenir, il faut que tous les excès dans l’exécution soient supprimés, que la loi seule soit exécutée et non les fantaisies de juristes passionnés, que les frais soient limités à ce qui est utile et raisonnable. Dans le passé, il faut que les responsabilités soient recherchées, non pas avec le souci détestable qui semble animer M. Combes, d’atteindre tel ou tel adversaire, mais avec le seul désir de satisfaire l’opinion en lui montrant la vérité.

Certains liquidateurs ont commis de lourdes fautes à n’en pas douter, car ils ont poursuivi des procédures abusives, engagé des dépenses excessives et ruineuses, méconnu trop souvent la loi : la loi des congrégations exécutée contre les tiers, c’est bien