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eux, les Français, puis les Anglais. Hyder-Ali et ses pareils peuvent se suivre à la trace du Malabar au Carnate.

Leur fureur iconoclaste est écrite au marteau sur les statues mutilées. Leur prudence s’affirme davantage par les chicanes multiples, par les dédales de murs enchevêtrés, reliant les blocs abrupts en une chaîne sans fin, divisant à l’extrême les réduits jugés trop vastes pour être sûrement gardés. Dans cette place imprenable et qui fut prise une dizaine de fois, les derniers occupans cherchèrent toujours à corriger les défauts du système, ou ce qu’ils y tenaient pour défauts. Nourrissant une confiance plus robuste dans la solidité de la pierre que dans le courage des hommes, ils entassèrent les couverts à commandemens étages, au lieu de s’attacher à l’organisation, à la discipline, et à l’établissement de ce service d’espionnage qui est, pour qui sait payer à propos, la ruine assurée de l’ennemi, en Inde comme ailleurs.

La confusion des styles, si l’on ne craignait pas de ranger dans quelque catégorie esthétique ces travaux appropriés aux besoins de l’heure, condamnerait à l’arbitraire une classification chronologique de ces amoncellemens de débris. Rendre justice aux divers profanateurs de Genji en établissant la part qui revient à chacun d’eux dans ces remaniemens, serait les condamner chacun, avec une pareille sévérité, pour des raisons différentes. Aux Hindouistes et aux Djaïnas seuls doit revenir un tribut d’éloges. Les premiers occupans musulmans méritent l’indulgence pour leurs bâtimens sans caractère, et la honte pour leurs dégâts. A partir de la fin du XVIIe siècle, sinon plus tôt, le vandalisme, d’où qu’il vienne, doit être flétri, sans mesure. Partout il a régné, sûr de l’impunité. Les sveltes kiosques, les élégans pagotins en clochetons, les majestueux mandapams des portes, la pagode aux mille colonnes, deviennent des carrières à ciel ouvert où la pierre équarrie s’offre à pied d’œuvre. Les maîtres successifs de Genji, dignes précurseurs des temps modernes, ne sacrifient plus qu’à l’utile. Si les enceintes doubles et triples, à, grand appareil, sommées des merlons amygdaloïdes du type sarrasin, sont épargnées, elles le doivent aux services qu’on en attend. Ces vieilles courtines crénelées n’avaient certainement pas été construites en un temps où le mousquet et l’artillerie prévalaient. Les vides des créneaux ne mesurent que dix-huit centimètres en largeur ; ce sont de véritables archères. Plus tard, lorsque les armes à feu devinrent d’usage courant, on perça une