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la princesse dort ses cent années ; le prince qui vient l’éveiller, s’appelle lui aussi Landry ; comme il a le même nom, il a les mêmes traits et le même âge que le fils de la vieille à la quenouille. Et pourtant ce n’est pas le même homme !... Mais j’aime mieux donner ma langue au chat.

Notons donc ces longueurs, ces lourdeurs, et aussi certaines fautes de goût ; je regrette surtout une pantomime des plus choquantes, et qui, dans une pièce destinée à la jeunesse, est parfaitement déplacée. Mais la féerie de MM. Richepin et Cain, comme toute féerie, lyrique ou non, se laisse entendre et surtout regarder avec agrément. Le tableau de la Cour du Roi est une merveille de décoration, et la ronde des jeunes filles, compagnes de la princesse, est tout ce qu’on peut imaginer de plus aimable et de plus frais. D’ailleurs, pour assurer le succès de la pièce, il suffirait du jeu de Mme Sarah Bernhardt. Elle n’a jamais été plus jeune, plus alerte, si elle est, comme toujours, unique pour dire les vers : cela tient du prodige. Probablement nous oublierons le prince Landry ; mais c’est sous les traits de Sarah que nous aimerons à évoquer le Prince Charmant.


L’Odéon représente en ce moment un ambigu de cinématographe et de drame larmoyant. Devant un public atterré se succède une série d’images découpées par l’auteur, M. Gustave Geffroy, journaliste et romancier de grand talent, dans son livre l’Apprentie. Pourquoi ces images, et non pas d’autres ? Nul n’en saura-jamais rien ; mais la règle du genre est le décousu. La partie cinématographique se compose d’un certain nombre de tableaux du Siège de Paris et de la Commune : le Rempart, le Père-Lachaise, etc. Puis on nous introduit dans un ménage d’ouvriers proches parens de ceux de l’Assommoir. Nous avons : la scène du delirium tremens, la rencontre d’une fille avec des souteneurs à l’ÉIysée-Montmartre, l’agonie de la vieille mère dans sa mansarde. C’est tout à fait ragaillardissant.


RENE DOUMIC