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en fait, le programme de politique religieuse qu’imposait la convention périmée ; et les lois qui, tout de suite, s’élaborèrent en Wurtemberg et en Bade, et qui apparaissaient comme une sorte de représaille de la puissance législative, ne furent à certains égards, en Wurtemberg surtout, qu’une adaptation de ces formules concordataires qu’on venait de déchirer. « Pour ce qui regarde la substance du projet de loi, écrivait au cardinal Antonelli le nouveau ministre wurtembergeois Golther, l’intention du gouvernement est que, sous réserve des droits et des intérêts de l’État et des autres confessions, la précédente convention serve de base, en substance, à la nouvelle législation projetée. »

Rien d’étonnant, dès lors, qu’en dépit de l’impolitesse faite au Saint-Siège par les gouvernemens, la revue Le Catholique, de Mayence, jugeât la situation sans pessimisme :


Le libéralisme, y lisait-on au début de 1863, a traîné les droits de l’Église devant le forum de la législation constitutionnelle. Mais les lois qui furent publiées nous ont donné plus de fumée que de feu, et dans l’ensemble elles se sont montrées inoffensives, puisqu’elles reconnaissaient en partie les droits de l’Église, et puisque, pour le reste, elles sont et resteront inapplicables. L’issue des orages constitutionnels est meilleure que nous ne le pensions. Nous n’avons rien perdu, beaucoup gagné.


VI

En Bade, cependant, une Chambre existait, prête à faire montre, sans ambages ni réserves, de ces « droits de l’État » que la rupture du concordat semblait avoir vengés et que la nouvelle législation venait d’affirmer. Dans cette terre badoise, où les catholiques forment les deux tiers de la population, une géométrie électorale subtilement concertée restreignait, d’une singulière façon, le nombre de leurs représentans : les circonscriptions étaient formées de telle sorte que, dans la plupart d’entre elles, le chiffre des catholiques n’atteignît pas la moitié des électeurs. La masse catholique rurale était sacrifiée aux agglomérations urbaines, où les protestans étaient plus nombreux. Ainsi la majorité parlementaire représentait en réalité la minorité du pays. Mais c’était là une question de fait, indifférente à Bluntschli et aux autres théoriciens du droit public : telle quelle, cette majorité personnifiait l’État ; elle avait droit, telle quelle, à une obéissance sans restriction.