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qui excusait presque les États-Unis et affirmait que l’incident n’avait pas d’importance internationale. Néanmoins, la presse d’opposition et une partie du public demeuraient nerveux. Très nettement, mais très courtoisement, le vicomte Aoki exposa à M. Root cette situation en lui demandant de prendre des mesures pour que les autorités scolaires de San Francisco respectassent les engagemens internationaux qui assuraient aux Japonais, sur le sol des États-Unis, l’égalité des droits avec la nation la plus favorisée. A dire vrai, la démarche de l’ambassadeur était presque superflue : car, au même moment, la publication de la dépêche envoyée à Tokyo par M. Root précisait les vues du gouvernement de l’Union, et ces vues semblaient faites pour apaiser toutes les craintes du Japon. « Vous pouvez, écrivait le secrétaire d’État, donner au gouvernement japonais, dans les termes les plus positifs, l’assurance que le gouvernement des États-Unis ne se proposerait jamais d’appliquer aux Japonais un traitement autre que celui qui est accordé aux nationaux du pays étranger le plus ami, et qu’il n’y a nullement lieu de supposer que le peuple des États-Unis désire voir le gouvernement adopter une autre politique. Le Président a invité le ministre de la Justice à procéder immédiatement à une enquête rigoureuse et à prendre les mesures qui pourront être nécessaires pour assurer le respect de tous les droits acquis par traité aux sujets japonais dans l’esprit d’amitié et de respect que notre peuple nourrit depuis si longtemps pour eux. » En même temps, M. Metcalf, secrétaire d’État du Commerce et du Travail, partait pour San Francisco, afin d’y faire une enquête sur l’agitation anti-japonaise.

La bonne volonté du gouvernement de Washington était indiscutable. Le respect des traités d’abord, ensuite le souci d’éviter soit dès représailles politiques, soit des rétorsions économiques analogues au boycottage des marchandises américaines en Chine, enfin le prix qu’il attachait par tradition et par raison à ses bonnes relations avec le Japon, tout garantissait sa sincérité. Sur un seul point, M. Root se trompait ; c’est quand il écrivait : « Il n’y a nul lieu de supposer que le peuple des États-Unis désire voir le gouvernement adopter une autre politique. » Cela était vrai sans doute des États de l’Est et du Centre ; ce ne l’était point de la Californie. Dans l’instant même que l’ambassadeur du Japon protestait contre les mesures scolaires, il était obligé de signaler aussi, toujours à San Francisco, la mise à